Les autorités rwandaises ont alors lancé contre lui un mandat d’arrestation.
Par conséquent, Léon Mugesera et sa famille ont fui le Rwanda pour le Canada. Il a été d‘abord réfugié politique avant que sa demande de résidence permanente ne soit accueillie en 1993. Il a occupé le poste d’enseignant de l’automne 1993 à l’hiver 1994 dans la prestigieuse université Laval de Québec.
Cependant, le discours prononcé par Mugesera en 1992 à Kabaya a alerté les autorités canadiennes qui lui reprochent d’avoir caché des informations aux fonctionnaires lors de sa demande de résidence permanente. En 1995, le Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration a engagé une procédure d’expulsion contre Mugesera au motif qu’en prononçant son discours, l’intéressé avait incité au meurtre, au génocide et à la haine et commis un crime contre l’Humanité. Un arbitre a conclu à la validité des allégations et a ordonné l’expulsion de Mugesera, décision confirmée par la Section d’appel de l’immigration de la Commission de l’immigration et du Statut de réfugié.
Une procédure judiciaire a été alors engagée. En 2001, la Cour fédérale canadienne a rejeté la demande de contrôle judiciaire pour les allégations d’incitation au meurtre, au génocide et à la haine mais l’a acceptée pour l’allégation de crime contre l’humanité.
En septembre 2003, la Cour d’appel fédérale a jugé infondées les allégations contre Léon Mugesera et a annulé la mesure d’expulsion.
Le 28 juin 2005, la Cour suprême canadienne a finalement estimé qu’il y avait des motifs raisonnables de penser que Léon Mugesera a commis un crime contre l’humanité et a conclu qu’il était non admissible au Canada. Cependant Mugesera résidait toujours au Canada, les autorités vérifiant si son expulsion présentait des risques relatifs à sa sécurité.
En mai 2006 le gouvernement rwandais a diffusé une liste de personnes suspectées d’avoir participé au génocide de 1994 et vivant à l’étranger. Le gouvernement rwandais a affirmé que ces personnes étaient désormais visées par des mandats d’arrêts internationaux. Il a demandé aux pays qui les abritent de les interpeller, de les juger ou de les transférer à Kigali. Le mandat d’arrêt émis par le Rwanda accusait Mugesera de génocide.
Au cours de l’été 2007, Mugesera a demandé à être jugé devant un tribunal canadien, estimant que s’il était expulsé au Rwanda, il serait tué et ne pourrait bénéficier des garanties d’un procès équitable. De plus, selon son avocat, 22 membres de la famille de Mugesera auraient été tués depuis 1994. Son expulsion est devenue plus probable depuis que le Rwanda a aboli la peine de mort, élément qui empêchait le Canada de procéder à son expulsion plus tôt.
L’Agence des Services Frontaliers du Canada devait donc déterminer si Léon Mugesera risquait d’être soumis à la torture ou à un traitement abusif s’il était renvoyé dans son pays. En effet, les Conventions internationales signées par le Canada interdisent à ce pays de procéder à l’expulsion de Mugesera si le gouvernement conclut à un risque réel.
Le 5 janvier 2012, Mugesera s’est vu notifié son extradition au 12 janvier 2012. Le Ministère de l’immigration avait rendu le 6 décembre 2011 un rapport indiquant que la vie de Mugesera ne serait pas en danger en cas de retour au Rwanda.
Le 9 janvier 2012, Mugesera a tenté de s’opposer à nouveau à son extradition devant la Cour Fédérale en indiquant que les garanties d’un procès équitable et de ne pas subir de mauvais traitements n’étaient pas suffisantes.
Le 11 janvier 2012, la Cour Fédérale a rejeté cette demande. Le même jour Mugesera a été hospitalisé suite à un malaise et se trouvait dans un état critique, selon sa famille. Il est sorti de l’hôpital le 14 janvier 2012, et il a été placé en détention.
Toujours le 11 janvier 2012, la veille de la date prévue de son extradition, le Comité des Nations unies contre la torture a demandé au Canada de suspendre temporairement l’expulsion de Mugesera suite à une demande de ses avocats d’examiner les risques de tortures qu’il pourrait subir au Rwanda.
Le 13 janvier 2012, un tribunal québécois lui a accordé un sursis de huit jours jusqu’au 20 janvier, afin de permettre au Comité des Nations unies contre la torture d’examiner sa demande. Le Comité avait demandé un délai de six mois.
Le 23 janvier 2012, le tribunal québécois s’est déclaré incompétent. Les avocats de Mugesera ont saisi à nouveau la Cour Fédérale, qui a refusé d’entendre la requête, ayant déjà pris une décision le 11 janvier à ce sujet. Dans la soirée, Léon Mugesera a quitté le Canada pour le Rwanda.
Le 25 janvier 2012, les autorités rwandaises ont indiqué que Mugesera serait présenté devant un tribunal dans les sept jours. La date provisoire pour son procès devant la Haute Cour de Kigali a été programmée au 2 Février 2012, mais Mugesera a demandé et obtenu d’avoir plus de temps pour préparer sa défense.
Le procès était fixé au 17 septembre 2012, mais Mugesera a demandé à la Haute Cour de reporter l’ouverture du procès afin de préparer sa défense. La Haute Cour a accordé la demande et a fixé le début du procès au 19 novembre 2012. Le procès a été suspendu pendant 27 jours et a repris le 17 décembre 2012. Les cinq accusations portées contre Mugesera lui ont été lues. Celles-ci incluent notamment l’incitation au génocide, planification et préparation du génocide, conspiration dans le crime de génocide, torture en tant que crime contre l’humanité et incitation à la haine entre les citoyens. L’accusé a refusé de plaider coupable ou non coupable et a invoqué la nullité de son procès. Cette demande a été rejetée par la Haute Cour le 24 Décembre 2012. Par la suite, Mugesera a demandé la récusation de deux des trois juges, mais cette demande a à nouveau été rejetée par la Haute Cour.
Le procès a finalement commencé en substance le 17 janvier 2013, bien que l’accusé ait refusé de plaider coupable ou non coupable. Le 31 janvier 2013 Mugesera a requis une aide juridique au ministre de la justice afin de pouvoir financer sa défense. Le 15 février 2013 Mugesera a plaidé non coupable de tous les chefs d’accusation.