- International Federation for Human Rights (FIDH)
- REDRESS
- TRIAL International
- European Center for Constitutional and Human Rights (ECCHR)
- Women’s Initiatives for Gender Justice
- Open Society Justice Initiative (OSJI)
Sauvez la Cour Pénale Internationale et l’État de Droit
22.09.2025 (
Modifié le :
26.09.2025 )
Des sources fiables indiquent que les États-Unis envisagent de sanctionner la Cour Pénale Internationale (CPI) en tant qu’institution dans les semaines à venir. Ces meances de sanctions font suite à une série de désignations visant le Procureur de la CPI, des procureurs adjoints et juges de la Cour, des ONG palestiniennes, ainsi que la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la situation des droits de l’Homme dans les territoires palestiniens occupés. Les États, la société civile, les universitaires, les journalistes et tous ceux qui sont engagés en faveur de la justice internationale et de l’État de droit doivent se mobiliser et faire tout leur possible pour défendre la Cour et les organisations qui soutiennent son travail.

La société civile du monde entier appelle de toute urgence les États parties au Statut de Rome à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour empêcher que des sanctions soient imposées par les États-Unis contre la CPI, une institution judiciaire indépendante chargée de lutter contre l’impunité pour les crimes internationaux les plus graves. Des sanctions prises unilatéralement par un État non partie contre la CPI constituent une attaque frontale contre cette Cour internationale soutenue par 125 États parties, et sur laquelle la communauté internationale dépend afin d’assurer la justice pour les crimes les plus graves. De telles sanctions priveraient d’innombrables victimes de recours. Elles entraveraient leur dernier espoir de justice, en instrumentalisant le système financier mondial pour étouffer le travail de la Cour. Elles renforceraient aussi un système de normes à deux vitesses, où le pouvoir et la politique déterminent quels survivants et survivantes méritent d’accéder à la justice.
Sanctionner la CPI marquerait un tournant dangereux dans l’histoire de la justice internationale, en transformant un système conçu pour tenir les plus hauts responsables de crimes de masse, en un système qui les protège. Cela revient à renoncer aux progrès durement acquis et de retourner vers un monde où la force prime sur le droit. Le système de justice internationale actuel, construit sur plusieurs décennies, pourrait s’effondrer sous cette pression extérieure qui vise à influencer indûment le cours de la justice. C’est une attaque totale contre l’État de droit, avec des conséquences dévastatrices pour la justice partout dans le monde : si la CPI peut être manipulée par la coercition financière, aucune cour ni mécanisme judiciaire n’est à l’abri, dans aucun pays ou région du monde.
Sanctionner la CPI en tant qu’institution pourrait l’empêcher de fonctionner, y compris en bloquant son accès aux financements des banques et des États, et en interdisant l’accès aux services essentiels à son fonctionnement. Le contrôle exercé par les États-Unis sur le système financier mondial garantit qu’une simple menace de sanctions a un impact dramatique, car partout dans le monde, les banques, assureurs et prestataires non américains tendent à se conformer de manière excessive aux décisions de sanctions, par crainte d’être eux-mêmes sanctionnés, bloquant même les transactions les plus banales. Sans fonds, la Cour risque de ne pas pouvoir maintenir ses opérations, payer son personnel, protéger ses données, garantir la sécurité des témoins, apporter l’aide juridictionnelle aux victimes et aux accusés, encore moins délivrer des réparations aux victimes de crimes internationaux. Ces sanctions menacent le fonctionnement même de la Cour, notamment la détention de suspects. Les avancées durement acquises, comme l’arrestation et la remise de l’ancien président des Philippines Rodrigo Duterte, ou encore l’arrestation en Allemagne du suspect libyen Khaled Mohamed Ali El Hishri, pourraient être réduites à néant. Les enquêtes en cours sur des crimes internationaux présumés dans d’autres situations pourraient être suspendues ou abandonnées indéfiniment, laissant les victimes du monde entier privées de justice.
Si ces sanctions rendent la Cour inopérante, il n’y aura pas de retour en arrière. Nous aurons perdu à jamais l’une des institutions les plus importantes de notre siècle. La communauté internationale doit réagir.
Nous appelons les États parties au Statut de Rome à protéger d’urgence la CPI et l’État de droit en :
- Rejetant publiquement et fermement les sanctions visant la CPI en tant qu’institution, son personnel et ses responsables, ainsi que les organisations et individus soutenant son travail.
- Intervenant auprès de l’administration américaine pour prévenir les désignations visant la CPI, son personnel et ses responsables, ainsi que les organisations et individus la soutenant.
- Mettant en oeuvre les mesures nationales et régionales de blocage, y compris le Règlement de blocage de l’Union Européenne (Règlement (CE) n° 2271/96), pour afficher leur solidarité et protéger les individus et entités contre l’impact des sanctions, tout en permettant aux entreprises présentes sur leur territoire de continuer à travailler avec la CPI, son personnel, et la société civile qui la soutient.
- Protégeant les prestataires de services en garantissant que la fourniture de services à la CPI et aux organisations qui la soutiennent est légale et protégée.
- Mettant en place des alternatives pratiques au réseau bancaire reposant sur le dollar américain ainsi que pour les transactions passant par le système financier américain, afin que la Cour et ses soutiens puissent continuer à financer leur travail.
- Fournissant des informations claires et créer des garanties juridiques pour empêcher les banques et prestataires non-américains de se conformer de manière excessive aux menaces de sanctions.
- Remplissant leurs obligations juridiques en vertu du Statut de Rome, notamment contribuer au budget annuel de la Cour, apporter un soutien politique à son indépendance et son fonctionnement, coopérer en vue d’arrêter et remettre les suspects à la Cour et résister à toute pression visant au désengagement des États en réponse aux sanctions.
Ci-dessous figure la liste complète des organisations ayant approuvé la déclaration, présentée par ordre chronologique :
Les organisations de la société civile souhaitant signer ce communiqué sont invitées à le faire ici.