Newsletter - Mai 2015

 

GUATEMALA

 

L’affaire Sperisen vue du Guatemala

 

Cette semaine, Erwin Sperisen est rejugé devant la Chambre pénale de la Cour de Justice de Genève. Condamné l’année dernière à la prison à vie pour l’assassinat de sept détenus au Guatemala en 2006, il avait fait appel de sa sentence.

 

Si l’ancien chef de la police nationale civile du Guatemala est jugé en Suisse, ce procès a également de fortes incidences au Guatemala où il cristallise, à bien des égards, la polarisation de la société guatémaltèque et les tensions qui la parcourent.

 

Au Guatemala, les scandales impliquant des membres de l’appareil d’Etat dans de graves violations des droits humains se succèdent depuis des décennies, mais peu ont eu à répondre de leurs actes devant la justice. Les élites au pouvoir bénéficient d’une large impunité et le pays souffre aujourd’hui encore de la corruption et du crime organisé.

 

Pour la société civile, ce manque de redevabilité n’a que trop duré. C’est par dizaines de milliers que les Guatémaltèques sont descendus dans la rue le 25 avril dernier pour exprimer leur indignation face à un système corrompu jusqu’à la moelle. Ils ont réclamé la destitution du président Otto Pérez Molina ainsi que celle de la vice-Présidente.

 

Dans ce contexte, le procès d’Erwin Sperisen recèle un fort potentiel: celui de contribuer au recul de l’impunité dont ont trop longtemps bénéficié les membres de l’appareil d’Etat guatémaltèque. Il vient aussi rappeler que la loi est la même en Suisse et au Guatemala, et que les policiers sont eux aussi tenus de la respecter.

 

NEPAL

 

Yuba Katwal obtient justice au nom de son mari

 

Il y a cinq ans, Yuba Katwal, aidée par TRIAL, déposait une plainte auprès des Nations unies au nom de son mari, enlevé par les forces de sécurité népalaises en 2001. Après un long combat, elle obtient enfin une reconnaissance longtemps attendue.

 

Chakra Bahadur Katwal était directeur d’un établissement scolaire. Il était également marié et père de quatre enfants. Le 9 décembre 2001, il reçoit une lettre l’invitant à se rendre au Bureau de l’Education du district. Il s’agissait en réalité d’un guet apens.

 

Une fois sur place, il aurait été emmené de force dans un bâtiment de l’armée. Le lendemain, des témoins l’ont aperçu : inconscient, le corps marqué de coups et les vêtements en sang, des soldats le traînaient vers un poste de police. Depuis ce jour, plus de nouvelles.

 

Durant la guerre civile, le gouvernement a mené d’effroyables campagnes de répression contre tous ceux qui étaient soupçonnés d’aider les insurgés maoïstes. De nombreuses familles ont ainsi été brisées.

 

Brisées, mais pas vaincues. Yuba Katwal a lutté pendant des années pour faire la lumière sur la disparition forcée de son mari. Mais les autorités népalaises ont fait la sourde oreille, et l’ont même emprisonné et torturé pour la réduire au silence.  

 

La décision de l’ONU ne rendra pas à Yuba Katwal son mari. Or elle vient couronner son combat au nom de la justice, met le Népal face à ses obligations et représente une lueur d’espoir pour toutes les victimes de l’impunité au Népal.

 

NEPAL

 

Tragédie après le séisme

 

Des avalanches dans l’Himalaya aux pluies de moussons diluviennes, la nature au Népal est connue pour ses violents excès.

 

Le 25 avril, elle a révélé son côté le plus sombre: le séisme de magnitude 7,8 qui a ébranlé le Népal ce jour-ci a causé des dégâts ahurissants. A ce jour, plus de 7,000 morts sont à déplorer et les vies de plus de 8 millions de personnes ont été touchées par la catastrophe. Ces chiffres, qui fendent le cœur, augmentent de jour en jour.

 

C’est avec une profonde tristesse et une inquiétude terrible que TRIAL a appris cette nouvelle. Nous avons contacté les victimes que nous soutenons au Népal ainsi que nos partenaires sur le terrain : heureusement, la plupart sont sains et saufs. Or certains ont perdu des proches ou restent sans nouvelles d’eux. D’autres ont vu leur maison s’effondrer ou ont trop peur de rentrer chez eux à cause des répliques. Un nombre incalculable de survivants vit à présent dans des campements de fortune, montés à la hâte autour de la capitale Katmandou.

 

Bien qu’elle ne puisse pas faire toute la différence, la forte mobilisation internationale qui s’est développée suite au séisme aide à alléger le poids de ces terribles pertes. Aux lendemains de la catastrophe, de multiples réseaux de solidarité se sont tissés et des opérations d’aide humanitaire à grande échelle ont été organisées. Fournir des logements, des médicaments, de la nourriture, de l’eau et rétablir les liens entre les familles : telles sont les priorités des équipes humanitaires sur le terrain.

 

La solidarité fait avancer. Continuons à aider le Népal.

 

RDC

 

Liberté pour Fred Bauma!

 

Fred Bauma est membre de Lucha (Lutte pour changement), une association de militants pacifistes épris de justice. Le 15 mars, lui et d’autres membres de ce groupe ont été victimes d’une terrible répression policière. Arrêté à Kinshasa par la police militaire congolaise, ce jeune défenseur des droits humains a été placé en détention arbitraire. Son crime ? Manifester pacifiquement pour la démocratie !

 

Presque deux mois se sont écoulés, et Fred Bauma est toujours sous les verrous. D’abord placé en détention au secret, il n’a jusqu’à présent pu voir ni un avocat, ni sa famille. Compte tenu des graves violations dont les forces de sécurité congolaises se rendent coupables, le risque est grand pour qu’il soit soumis à la torture.

 

Plusieurs associations africaines ont unies leurs forces pour dénoncer ce coup dur porté à la justice. TRIAL, engagée dans la lutte contre l’impunité en RDC, s’est joint à ces efforts en portant le cas de Fred Bauma devant l’ONU.

 

En avril, l’ONG a en effet soumis un appel urgent au nom de Fred Bauma au Groupe de travail sur la détention arbitraire, au Rapporteur spécial sur la situation des défenseurs des droits de l'homme et au Rapporteur spécial sur la torture.

 

TRIAL invite la communauté internationale à s’unir en soutien à Fred Bauma et appelle à sa libération immédiate et inconditionnelle.

 

BURUNDI

 

Elections sous haute tension

 

A l’approche des élections présidentielles, la situation au Burundi s’embrase. La confirmation que Pierre Nkurunziza briguera un troisième mandat a provoqué un soulèvement populaire massif, réprimé dans la violence par les forces de police et les Imbonerakure.

 

De toutes parts et jusque dans les plus hautes sphères, les voix s’élèvent pour dénoncer le recours à la violence et appeler à une résolution pacifique de la situation. Le Secrétaire général des Nations unies en personne a récemment déploré la recrudescence des tensions et appelé le président burundais à respecter les Accords d’Arusha et de la Constitution du pays. Le porte-parole du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, lui, se dit « préoccupé par l’escalade de la répression gouvernementale ». En outre, six experts des Nations unies ont appelé les autorités à enquêter sur les graves violations commises chaque jour contre les citoyens.

 

Dans ce climat extrêmement tendu, défenseurs des droits humains et journalistes sont la cible de menaces incessantes. Pierre-Claver Mbonimpa, président de l’organisation des droits humains APRODH, a été détenu une journée et interrogé par le Service des renseignements. Pour museler toute opposition, les autorités ont même fermé il y a plus d’une semaine la très populaire radio publique africaine (RPA). Elle n’émet plus depuis.

 

TRIAL s’associe à toutes les voix appelant au respect du droit et tient à rendre hommage à ces femmes et ces hommes dont l’engagement pour la paix est immense.

 

 

 

BOSNIE-HERZEGOVINE

 

Les survivants des camps de Vitez font entendre leur voix 

 

Pour la première fois depuis la fin de la guerre, les victimes des camps de Vitez (Bosnie Centrale) ont commémoré le « Jour des prisonniers des camps ». TRIAL a participé à cette commémoration, rendu hommage à ceux qui sont morts et exprimé tout son soutien aux survivants dans leur quête de justice.

 

Durant la guerre en Bosnie (1992-1995), des centaines de Bosniaques de Vitez ont été arrachés à leurs foyers et fait prisonniers dans des camps. Dans ces universités et cinémas transformés en prisons, ils étaient soumis à la torture et contraints aux travaux forcés. Certains ont même été emmenés au front pour servir de boucliers humains.

 

Aux lendemains de la guerre, des leaders politiques et membres du Conseil de défense croate (HVO) ont été condamnés par le Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie pour les actes barbares commis dans la région.

 

Mais qu’en est-il des survivants ? Vingt ans se sont écoulés mais les anciens détenus des camps de Vitez n’ont toujours pas obtenu justice.

 

Lors de cette première commémoration, ils ont exprimé des revendications longtemps enfouies : d’une même voix, ils ont appelé le gouvernement à adopter une loi pour les victimes de torture. Si une telle loi venait à exister, ce sont 200 000 victimes qui pourraient enfin obtenir réparation.

 

Sans reconnaissance officielle et sans réparation, la reconstruction post-conflit ne peut aboutir. TRIAL exhorte les autorités bosniennes à agir.

 

 

 

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TRIAL rend justice aux victimes de crimes internationaux