Des centaines de personnes toujours introuvables au Kenya: TRIAL saisit l’ONU

06.07.2011 ( Modifié le : 17.07.2017 )

Genève, 6 juillet 2011

L’impunité règne toujours dans le district du Mont Elgon, au Kenya occidental, où des centaines d’hommes ont fait l’objet de disparitions forcées commises par le gouvernement lors d’opérations militaires en 2008. Pour la deuxième fois cette année, TRIAL (Association suisse contre l’impunité) et son partenaire, l’ONG locale Western Kenya Human Rights Watch (WKHRW), ont saisi le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires des Nations Unies, lui soumettant vingt cas individuels de disparitions forcées perpétrées par l’armée kenyane.

TRIAL a présenté ces affaires au Groupe de travail lors d’une rencontre privée qui a réuni les membres du Groupe de travail des Nations Unies sur les disparitions forcées ou involontaires (GTDFI), les représentants de TRIAL ainsi que le directeur exécutif de Western Kenya Human Rights Watch. Cette réunion, qui s’est tenue aujourd’hui à Genève, a offert l’occasion de discuter de la situation des disparitions forcées au Mont Elgon. TRIAL a par ailleurs saisi l’opportunité de rappeler aux experts du GTDFI l’urgence de transmettre ces affaires aux autorités kenyanes.

Selon le mandat du Groupe de travail, toute personne peut lui communiquer des cas de disparitions forcées. Le GTDFI transmet alors les affaires au gouvernement concerné s’assurant que des enquêtes s’ensuivent pour que le sort des disparus et le lieu où ils se trouvent soient établis. Dans cette optique, le Groupe de travail intervient comme un intermédiaire nécessaire entre les familles des victimes, ou leurs représentants, et les autorités.

A ce jour, TRIAL et WKHRW ont déposé quarante affaires auprès du Groupe de travail. Des dizaines d’autres cas ont été répertoriés et se trouvent en cours d’étude pour une prochaine transmission au Groupe de travail une fois les dossiers finalisés. Au-delà des cas déjà déposés, TRIAL avait déjà présenté en mai dernier une allégation générale au Groupe de travail en ce qui concerne la législation kenyane en matière de disparitions forcées et le contexte général de survenance de ces violences, mettant en lumière les divers obstacles au respect et à la mise en œuvre de la Déclaration de 1992 sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

Avant que TRIAL et WKHRW ne soumettent les premiers vingt cas individuels de disparitions forcées dans le district kenyan de Mount Elgon en mai dernier, le Groupe de travail n’avait encore jamais reçu une quelconque affaire de disparitions forcées impliquant le Kenya, bien qu’il s’agisse de l’organe onusien compétent pour traiter cette problématique.

Contexte

Fin 2006, un groupe armé, les « Sabaot Land Defence Forces » (SLDF), a vu le jour pour résister aux tentatives de redistribution des terres par le gouvernement. Au fil du temps, les SDLF ont accru leur contrôle sur la région, déplaçant de force les populations indésirables et commettant nombre d’atrocités. La réponse du gouvernement, initialement terne, a pris une tournure plus marquée en mars 2008 par l’envoi d’une opération militaro-policière, appelée Okoa Maisha (“Sauver des Vies” en Swahili). La population locale, initialement soulagée par cette intervention, a cependant rapidement été aliénée par la pratique du gouvernement consistant à détenir tous les garçons et les hommes, torturant parfois certains jusqu’à la mort, afin d’identifier les membres du SLDF. Malgré de nombreux rapports d’ONG, l’Etat a fermement nié que de telles violations des droits humains avaient eu lieu. Plus de trois années après l’opération militaire, des centaines d’hommes et de garçons restent introuvables. Aucune enquête sur ces crimes n’a jamais été amorcée et les familles des victimes se voient refusées leur droit à la vérité, à la justice et des réparations. Les souffrances de ces familles reste totalement ignorées, celles-ci continuant à éprouver angoisse, frustration, détresse et incertitude.

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