Pillage: Un homme d’affaires suisse sous enquête pour des crimes de guerre commis en RDC

12.12.2019 ( Modifié le : 13.12.2019 )

TRIAL International et Open Society Justice Initiative (OSJI) saluent l’ouverture d’une enquête pénale par le Ministère public de la Confédération sur les agissements de Christoph Huber, un ressortissant suisse actif dans le secteur minier. M. Huber est suspecté de pillage de ressources naturelles en République démocratique du Congo, un crime de guerre aux yeux de la loi suisse. En novembre 2016, les deux organisations avaient déposé une dénonciation pénale, étayée par les nombreuses preuves récoltées au cours de leur enquête débutée en 2013.

L’exploitation illégale de ressources naturelles d’une zone de conflit pourrait valoir à M. Huber d’être accusé de pillage, un crime de guerre selon le droit international humanitaire. ©GuyOliver/IRIN

Le Ministère public de la Confédération (MPC) a confirmé avoir ouvert une procédure pénale contre l’homme d’affaires suisse Christoph Huber, selon les révélations de l’agence de presse Bloomberg. Le MPC enquête sur les accusations – formulées par TRIAL International et OSJI – de commerce illicite de minerais en République démocratique du Congo (RDC) au cours de la deuxième guerre du Congo entre 1998 et 2003.

« Nous avons mis la main sur des documents commerciaux, ainsi que des documents internes du RCD-Goma, démontrant les liens d’affaire entretenus par Christoph Huber et ce groupe armé», a déclaré Bénédict De Moerloose, responsable du programme Procédures et enquêtes internationales de TRIAL International. «A l’heure où le public exige un engagement accru du secteur privé en faveur du respect des droits humains, l’ouverture d’une enquête sur les agissements d’un homme d’affaire occidental impliqué dans un commerce illégal en zone de conflit envoie un message fort à tout le secteur minier. »

Selon Ken Hurwitz, responsable du programme anticorruption de OSJI, « de nombreux conflits sont encore alimentés par la vente illégale de ressources pillées. Mais les entreprises et les hommes d’affaires impliqués ne sont que trop rarement poursuivis. Nous saluons l’ouverture d’une procédure par les autorités suisses dans cette affaire aussi complexe qu’importante. »

Les explications de Bénédict De Moerloose dans l’émission Forum de la Radio Télévision Suisse, le 12 décembre 2019

Des liens avec un groupe armé

Les deux organisations ont notamment découvert que M. Huber commerçait directement avec le RCD-Goma, un groupe armé accusé de crimes de guerre qui contrôlait de larges territoires dans l’Est du Congo pendant le conflit. L’exploitation illégale et l’appropriation de ressources naturelles d’une zone de conflit vaut à M. Huber d’être accusé de pillage, un crime de guerre selon le droit international humanitaire, et punissable selon le code pénal suisse d’une peine de prison de trois ans au moins.

En 2001, l’entreprise représentée par M. Huber a obtenu quatre concessions minières de la part du RCD-Goma, qui occupait militairement la zone dans laquelle se trouvent les mines. L’octroi de ces concessions était assorti de garanties de protection, assurées par les soldats du groupe armé. M. Huber est impliqué dans le commerce de minerais dans la région au moins depuis 1997 pour le compte d’autres entreprises, y compris suisses.

Les deux organisations invitent maintenant le MPC à conclure rapidement son enquête.

Un éventuel procès dans cette affaire constituerait un précédent historique. En effet, aucun acteur économique n’a été condamné pour pillage de matières premières depuis les procès qui ont suivi la Seconde Guerre Mondiale. Pourtant, cette pratique a atteint des proportions alarmantes au cours des dernières décennies.

 

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