Affaire Migamba (RDC) : quand l’exploitation minière conduit à des crimes de masse

04.01.2021 ( Modifié le : 13.01.2021 )

Les richesses minières du Sud Kivu, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), attisent les violences de (et entre) milices armées. Or l’exploitation illégale ou l’accaparement de ressources naturelles peut mener à de graves crimes contre les populations locales. C’est le cas dans l’affaire Migamba, dont s’est saisie TRIAL International en 2019. En janvier 2021, un chef de milice a été reconnu coupable de crimes contre l’humanité.

Les hommes de la milice Raiya Mutomboki Charlequin ont organisé une série d’attaques contre la population civile de plusieurs villages au Sud Kivu. ©TRIAL International

Les milices Raya Mutomboki sont responsable de nombreuses exactions au Sud Kivu. TRIAL International a elle-même contribué au procès de l’un de ses chefs les plus redoutés en 2019. Mais le Raya Mutomboki se compose d’une multitude de groupuscules, qui tantôt s’opposent, tantôt opèrent conjointement. Dans l’affaire Migamba, c’est la faction Raiya Mutomboki Charlequin qui s’est rendu coupable d’attaques de civils.

 

Attaquer des civils pour exploiter le minerai

Plus précisément, les hommes du général autoproclamé Charlequin Julio – qui a donné son nom au groupe – ont organisé une série d’attaques contre la population civile des villages de Migamba, Bugumbu et Nyamingilingili, (territoire de Mwenga, Sud Kivu). Pendant cinq ans, de 2007 à 2012, ils ont commis des crimes de meurtre, viol, torture, esclavage sexuel et privation de liberté à l’encontre d’une centaine de victimes.

Ce sont les sols de la zone, riches de minerai, qui ont attiré la convoitise du Raiya Mutomboki Charlequin. En attaquant ces villages de manière répétée, ils voulaient contraindre la population à fuir et ainsi s’arroger le contrôle des mines alentours.

 

L’adjoint de Charlequin sur le banc des accusés

Le bras droit du chef de la milice, Takungomo Mukambilwa Le Pouce, a été arrêté en 2020. Il comparait devant les juges pour crimes contre l’humanité. En effet, les crimes commis par le Raiya Mutomboki Charlequin étaient généralisés et systématiques, ce qui pourrait les faire qualifier de crimes internationaux.

En 2019, TRIAL International a commencé à travailler sur le dossier avec une ONG locale. Elle a formé deux avocats qui ont assisté, en décembre 2019, les victimes dans les auditions devant le procureur militaire. Ces deux mêmes avocats représentent les victimes dans le procès, qui s’est ouvert dans les tout premiers jours de 2021.

Le 11 janvier 2021, au terme d’audiences foraines, Takungomo Mukambilwa Le Pouce a été condamné à 20 ans de prison. Il a été reconnu coupable de meurtre, viol, esclavage sexuel, torture, emprisonnement, disparitions forcées et autres actes inhumains constitutifs de crimes contre l’humanité. Plus de 170 victimes se sont vues octroyer des réparations, et le tribunal a également ordonné des mesures de réinstallation des victimes. L’État congolais n’a pas été condamné en solidarité.

 

Le travail de TRIAL International sur ce dossier est mené dans le cadre de la Task Force Justice Pénale Internationale, un réseau informel d’acteurs internationaux qui collaborent afin de soutenir le travail des juridictions militaires congolaises dans l’enquête et la poursuite des crimes de masse en RDC.

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