Justice en action : 10 ans de lutte contre l’impunité en RDC !
Depuis plus de 10 ans, TRIAL International est au coeur de la lutte contre l’impunité des crimes internationaux en République démocratique du Congo (RDC). Grâce notamment à votre appui, nous avons pu mener un programme ambitieux, renforçant les capacités des acteur·rices locaux·ales et offrant une voie vers la justice à des milliers de victimes de crimes graves. Cet anniversaire est l’occasion de revenir sur les grands moments de notre engagement en RDC.
En 2014, l’ouverture de notre bureau à Bukavu, au Sud-Kivu, a marqué le début de notre présence active en RDC. Cette année-là, nous avons formé des avocat·es et des ONG locales sur les meilleures pratiques de défense des droits humains, leur permettant de représenter plus efficacement les victimes devant les tribunaux congolais. Ce premier pas fut décisif pour poser les bases d’une stratégie durable de lutte contre l’impunité.
Après un premier procès mené en août 2016, plusieurs affaires marquantes ont renforcé notre impact sur le terrain. L’une des affaires les plus importantes de cette période est celle de Kavumu, où un groupe de 11 miliciens, dirigé par un député provincial, a été jugé pour des crimes de violences sexuelles perpétrés contre des dizaines d’enfants dans le village de Kavumu entre 2013 et 2016. Grâce à la mobilisation de nos équipes, soutenues notamment par vos dons, ce procès a abouti en décembre 2017 à une condamnation historique. Le député et ses hommes ont été reconnus responsables de viols systématiques constituant des crimes contre l’humanité : une victoire majeure dans la lutte contre les violences sexuelles en RDC. Ce procès, qui a fait la une des médias internationaux, a non seulement rendu justice aux victimes, mais a également été historique par la condamnation, pour la première fois en RDC, d’un parlementaire en fonction.
La condamnation de Ntabo Ntaberi Sheka, chef de milice notoire au Nord-Kivu, en septembre 2020, fut tout aussi emblématique. Grâce à des années d’enquête rigoureuse et un procès de deux ans, Sheka a été reconnu coupable de crimes de guerre, dont des massacres de civils et des viols de masse. Ce procès a été une victoire essentielle pour la reconnaissance des droits des centaines de victimes concernées. Il a également renforcé la crédibilité des instances judiciaires de cette région, ravagée par les violences, en démontrant leur capacité à gérer un cas juridiquement et sécuritairement très complexe.
Le procès Sheka en quelques photos…
©TRIAL International
En mars 2021, une autre avancée majeure a été réalisée avec le jugement de la première affaire de crimes internationaux dans la région du Kasaï, dans l’affaire Nsumbu. Ce procès, qui s’est déroulé au Kasaï-central, a vu la condamnation de miliciens pour meurtre, torture, pillage et prise d’otages comme crimes de guerre. C’était la première fois que des crimes graves liés au conflit dit « Kamuina Nsapu », qui avait dévasté cette région entre 2016 et 2018, ont été sanctionnés, envoyant un signal fort aux victimes et aux responsables de violences.
Par ailleurs, en janvier 2022, nous avons franchi une étape importante avec l’ouverture de notre bureau à Kananga, au Kasaï-central, élargissant ainsi notre présence en RDC et permettant de répondre plus directement aux besoins des victimes et de la société civile dans cette région. Ce nouveau bureau a permis de renforcer la collaboration avec les autorités judiciaires locales et de multiplier les formations pour les avocat·es et magistrat·es locaux·ales.
Conscient·es que la réconciliation nationale passe par une reconnaissance des crimes passés, nous souhaitons soutenir la mise en oeuvre de mécanismes adéquats et inclusifs de justice transitionnelle qui permettent aux victimes d’obtenir vérité, justice et réparation. Pour ce faire, nous travaillons en étroite collaboration avec les communautés affectées et les institutions locales récemment établies à cet effet telles que la Commission provinciale vérité, justice et réconciliation au Kasaï-central ainsi que le Fonds national des réparations pour les victimes de crimes graves (FONAREV).
À ce jour, et grâce à votre soutien, nous avons facilité l’accès à la justice pour environ
9 900 victimes, dont plus de 4 900 femmes et 1 700 victimes de violences sexuelles,
devant les tribunaux nationaux et internationaux.
En seulement dix ans, plus de 30 procès ont été menés, avec plus de
2 000 victimes obtenant des décisions favorables.
Malgré les avancées, de nombreux défis subsistent en RDC. De nombreux crimes internationaux restent impunis, en particulier ceux commis avant 2002, faute de mécanismes adaptés. La lenteur du système judiciaire, les interférences politiques et la qualité insuffisante des enquêtes compromettent l’accès à la justice pour de nombreuses victimes. Avec le retrait de la mission onusienne de maintien de la paix en RDC en 2024, le besoin de renforcer les capacités locales est plus urgent que jamais. Votre soutien est essentiel pour surmonter ces obstacles et garantir que chaque victime puisse obtenir justice.
Grâce à vous, nous pourrons poursuivre la formation des avocat·es, soutenir et mener des enquêtes et offrir une assistance juridique afin que davantage de victimes accèdent à la justice qu’elles méritent. Nous vous remercions sincèrement pour votre engagement passé et espérons pouvoir compter à nouveau sur votre générosité pour écrire ensemble les prochaines pages de cette lutte cruciale contre l’impunité.
Avec toute notre gratitude,
Daniele Perissi
Responsable du programme RDC