Srebrenica, 25 ans après: l’héritage d’un génocide

10.07.2020

Il y a tout juste 25 ans, le monde découvrait avec horreur que la barbarie n’appartenait pas au passé. En l’espace de quelques jours et dès le 11 juillet 1995, les Serbes de Bosnie menés par Ratko Mladić ont exterminé plus de 8 000 Bosniaques dans l’enclave de Srebrenica, sous les yeux de la communauté internationale. Que reste-t-il aujourd’hui de ce traumatisme ? Quel impact le plus grand massacre commis en Europe depuis la Seconde guerre mondiale a-t-il sur les personnes qui défendent les droits des victimes de ce conflit ? Eléments de réponse avec les membres du bureau de TRIAL International à Sarajevo.

Plus de 8 000 Bosniaques ont été exterminés à Srebrenica, mais le devoir de mémoire n’est pas au goût de tous. ©Jelle Visser/CC

Il est difficile pour quelqu’un qui n’a pas grandi en Bosnie-Herzégovine (BiH) de comprendre combien les histoires liées à la guerre font partie de votre vie quotidienne, à travers les gens autour de vous, la télévision, l’éducation, les films, explique Amina Hujdur, chargée de communication pour TRIAL International à Sarajevo. « Pendant mon enfance, il me semblait que le génocide de Srebrenica était présent partout », se souvient-elle. En grandissant, elle a pris conscience de l’importance des événements qui se sont produits, en particulier lorsque, jeune journaliste, elle a couvert le procès de Ratko Mladić devant le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie. « Je me souviens qu’un jour, j’ai été chargée d’interviewer les familles des personnes tuées lors du génocide de Srebrenica. J’ai ressenti le fardeau que représente la tâche de raconter les histoires de ces personnes qui ont tant souffert. Je me sentais démunie, inadéquate. J’ai demandé à l’une des femmes ce que le verdict du lendemain signifiait pour elle. ‘Je veux juste que les gens sachent. Et demain, tout le monde saura’, a répondu la femme. »

Le devoir de mémoire n’est pourtant pas du goût de tous, surtout ces dernières années qui ont vu une hausse des discours négationnistes. « Bien que le génocide de Srebrenica ait défini l’histoire de la Bosnie-Herzégovine et montré au monde entier l’ampleur des atrocités qui se sont produites entre 1992 et 1995, ces événements sont aujourd’hui souvent niés publiquement », déclare Lamija Tiro, conseillère juridique de TRIAL International. Le génocide de Srebrenica est souvent présent dans son esprit, assure-t-elle, et alimente sa motivation pour lutter contre l’impunité, la négation des crimes de guerre et la glorification des criminels de guerre.

« J’ai grandi pendant la guerre en Bosnie-Herzégovine, et je vis et travaille dans une société post-conflit », témoigne Berina Žutić Razić, conseillère juridique chez TRIAL International à Sarajevo. « Je me suis toujours sentie motivée pour aider les survivants des atrocités de la guerre. » Son engagement, elle l’explique par son désir d’aider les habitants de son pays à se réconcilier, et à fournir une assistance aux victimes de la guerre.

Malgré les preuves innombrables et les décisions unanimes de plusieurs tribunaux internationaux, la négation du génocide de Srebrenica est toujours très présente, 25 ans après les faits. Il est donc crucial que la société bosnienne reconnaisse tous les crimes qui se sont produits pendant la guerre, y compris le génocide de Srebrenica. Ce n’est qu’en affrontant son passé que la BiH pourra construire son avenir. Un avenir dans lequel de telles atrocités ne se reproduiront plus.

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