Disparition forcée de M. Farid Faraoun en février 1997

12.02.2016 ( Modifié le : 15.09.2016 )

Courant mai 2009, TRIAL a introduit pour le compte de AOUALI Mouni épouse FARAOUN, FARAOUN Feryale et BOUREGBA Fatiha, agissant respectivement en leur qualité d’épouse, fille et mère de M. Farid FARAOUN, une communication individuelle contre l’Algérie devant le Comité des Droits de l’Homme des Nations unies.

Il s’agit du treizième dossier déposé contre l’Algérie par le CAJ.

Agriculteur, éleveur de bovins et producteur de lait, Monsieur Farid FARAOUN était une personnalité de sa région. Le 11 février 1997 à 12 h. 45. Il a été arbitrairement arrêté à son domicile par des agents de la sûreté de la wilaya de Sidi-Bel-Abbes, dans le cadre d’une vaste opération de police.

Il est porté disparu depuis.

Le lendemain de son arrestation, son épouse et ses enfants ont été expulsés par les forces de police du domicile familial, lequel a été immédiatement et intégralement détruit par des engins de démolition.

Dans la nuit du 12 février 1997, l’épouse de Monsieur FARAOUN a pu secrètement rencontrer un agent de l’Etat qui lui a indiqué que son mari avait été torturé la nuit de son arrestation. Dans les mois qui ont suivi, la famille a reçu des informations de sources différentes, selon lesquelles Farid FARAOUN avait été  blessé et vu dans deux hôpitaux militaires.

Sa famille n’a plus réussi à le localiser par la suite et n’a pu avoir aucun contact avec lui. Malgré de nombreuses démarches auprès des autorités pour solliciter l’ouverture d’une enquête, aucune information n’a pu être obtenue sur le sort réservé à Farid FARAOUN.

Il est demandé au Comité de déclarer que la disparition de Farid FARAOUN constitue, à son égard, une violation du droit à la vie; à ne pas subir de torture ou des traitements cruels, inhumains ou dégradants; à la liberté et à la sécurité de la personne; de recevoir en détention un traitement respectueux de la dignité humaine; à être reconnu en tant que sujet de droit; de ne pas faire l’objet d’immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille et son domicile;  au respect de la vie familiale et à un recours effectif pour ces violations (articles 6 § 1, 7, 9 § 1, 2, 3 et 4, 10 § 1, 16, 17, 23 § 1 et 2 § 3 duPacte international relatif aux droits civils et politiques).

Il est également demandé qu’une enquête sur les circonstances des violations alléguées soit entreprise et que les personnes responsables soient pénalement poursuivies en justice.

Il est en outre demandé au Comité de constater que les auteurs de la communication ont elles-mêmes subi une violation de leur droit à ne pas subir des traitements cruels, inhumains ou dégradants; de ne pas faire l’objet d’immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille et son domicile; au respect de la vie familiale et à un recours effectif pour ces violations (articles 2 § 3, 7, 17 et 23 § 1 du Pacte).

La procédure est en cours devant le Comité des droits de l’homme des Nations unies.

La décision

Au mois d’octobre 2013, le Comité des droits de l’Homme a communiqué sa décision(appelée « constatations » dans les termes onusiens).

Le Comité a retenu que l’Algérie avait violé les articles 6 §1, 7, 9, 10 §1 et 16 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, individuellement et lus conjointement avec l’article 2 § 3, ainsi que l’article 17 lu conjointement avec l’article 1 §3 du Pacte, à l’égard de Farid Faraoun. Le Comité a également constaté une violation des articles 7 et 17, individuellement et lus conjointement avec l’article 2 par. 3 du Pacte, à l’égard de la famille de la victime.

Le Comité a notamment enjoint l’Algérie de « mener une enquête approfondie et rigoureuse sur la disparition de Farid Faraoun ». L’Algérie doit également « fournir aux auteurs des informations détaillées quant aux résultats de son enquête », « libérer immédiatement l’intéressé au cas où il serait toujours détenu au secret » ou « restituer sa dépouille à sa famille » en cas de décès. Le Comité insiste par ailleurs sur l’obligation qu’a l’Algérie de  » poursuivre, juger et punir les responsables des violations commises ». L’Algérie doit également « indemniser de manière appropriée [la famille de la victime] pour les violations subies, ainsi que [la victime elle-même] s[i elle] est en vie ».

L’Algérie doit par ailleurs garantir l’efficacité de son système judiciaire, en particulier en ce qui concerne les victimes de torture, d’exécutions extrajudiciaires et de disparitions forcées, et prendre des mesures pour éviter que de telles violations ne se reproduisent

 

Le contexte général

Ces évènements s’inscrivent pendant la guerre civile algérienne durant laquelle des milliers de personnes ont disparu. En effet, selon les sources, de 7’000 à 20’000 personnes auraient été enlevées par les services de sécurité algériens entre 1992 et 1998.  Les membres de ces services agissaient dans toute impunité.  Depuis la mise en œuvre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale en 2006, ces derniers bénéficient d’une complète amnistie. Il est d’ailleurs maintenant interdit de porter plainte contre des crimes ou exactions comme ceux dont M. FARAOUN a été la victime.

 

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