Burundi : la Commission Africaine des droits de l’homme et des peuples condamne à nouveau le Burundi pour une affaire d’exécution extrajudiciaire

09.01.2024
Dans sa décision sur l’affaire Famille de Feu Jackson Ndikuriyo c. Burundi, la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (la Commission africaine) reconnaît le caractère extrajudiciaire de la mort de M. Ndikuriyo et demande (
à nouveau !) au Burundi « de mettre en place des mécanismes pour lutter contre l’impunité généralisée en matière d’exécution extrajudiciaires.»

L’ACAT-Burundi, l’APRODH, le FOCODE, le FORSC et TRIAL International saluent la décision de la Commission africaine dans le dossier concernant Feu Jackson Ndikuriyo, affaire que ces ONG avaient porté à l’attention de la Commission en 2014.
Jackson Ndikuriyo, ancien policier, a été victime d’une exécution extrajudiciaire le 26 août 2010, après avoir été arrêté par la police. Fin 2009, il avait dénoncé publiquement la corruption qui sévissait au sein de la Police Nationale du Burundi. Placé en détention, de manière arbitraire, sans aucune inculpation, de décembre 2009 à janvier 2010, il a continué à faire entendre sa voix, ce qui a amené à son licenciement de la police en août 2010. Face à la pression grandissante et aux menaces de morts par des membres de la police nationale, M. Ndikuriyo a été contraint de vivre dans la clandestinité, ce qui n’a pas suffi à le protéger.

Le décès de M. Ndikuriyo « fut une énorme perte pour notre famille, qui comptait beaucoup sur lui », nous rappelle un proche. Feu Ndikuriyo a d’ailleurs laissé trois enfants, entre autres. Albert (nom d’emprunt) s’est montré très content d’apprendre le contenu de la décision de la Commission africaine. « C’est vraiment une très bonne nouvelle pour moi d’apprendre qu’une instance internationale a reconnu la réalité des violations que le défunt et nous autres membres de sa famille avons subi. C’est un réel soulagement même si cela ne ramène pas le nôtre qui a disparu », a exclamé Albert, lorsque nous avons parcouru avec lui la décision.

« Nous n’avons même pas eu le droit de l’enterrer dignement », ajoute Albert. En effet, la famille n’a jamais pu voir la dépouille de Feu Ndikuriyo ni même organiser d’enterrement digne malgré ses demandes réitérées en ce sens.

La Commission africaine a par ailleurs conclu que les faits de l’espèce révèlent « des actes de torture morale » qui ont été perpétrés non seulement à l’encontre de M. Jackson Ndikuriyo, mais aussi de sa famille. Sa famille se demande ainsi si elle pourra un jour bénéficier de réparations… Or, dans sa décision, la Commission africaine demande en effet aux autorités burundaises de « mener une enquête approfondie […] sur l’exécution de la victime » ainsi que « d’accorder aux ayants droits […] une réparation adéquate et suffisante ainsi que l’assistance médicale et psychologique nécessaire ». Cependant, la mise en œuvre de cette décision dépend finalement de la volonté politique des autorités burundaises.

L’ACAT-Burundi, l’APRODH, le FOCODE, le FORSC et TRIAL International appellent les autorités burundaises à mettre en œuvre les décisions de la Commission africaine qui leur sont adressées, dont celle-ci. Il est primordial que le Burundi s’engage promptement dans un processus de justice crédible et durable pour que les responsables de crimes graves soient poursuivis et les victimes puissent obtenir réparation.

Lire la décision de la Commission africaine en pièce jointe  

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