Burundi : une affaire de viol sur mineure devant les juges

07.02.2017 ( Modifié le : 29.08.2019 )

 
Caritas a été violée à l’âge de 10 ans. Fait inhabituel au Burundi, un procès a eu lieu… sous des auspices malheureusement peu favorables. 

 

Les faits

Au Burundi, la tenue d’un procès contre un militaire est suffisamment rare pour être saluée. Généralement, l’impunité des hommes en uniforme est totale. Sans doute les faits étaient-ils trop accablants pour fermer les yeux : une mineure violée, un accusé prise en flagrant délit, de nombreux témoins…

Une fois n’est pas coutume, la machine juridique s’est donc mise en marche. En 6 ans de travail sur le pays, c’est la première fois qu’une affaire menée par TRIAL aboutit à un procès au niveau national. Vu l’inertie de la justice burundaise, les affaires de TRIAL sont le plus souvent portées devant des instances régionales ou onusiennes.

« Le dossier a été bien instruit par la police et le parquet », se félicite Me B.N., avocat formé par TRIAL International et représentant légal de la victime. « Nous avions bon espoir que Caritas (nom d’emprunt) obtiendrait justice. »

L’optimisme a malheureusement été de courte durée. Dès l’ouverture du procès, les irrégularités se sont multipliées.

 

Procédure

Entre autres anomalies, Me B.N. s’est vu retiré la parole à maintes reprises lorsqu’il a voulu appuyer les allégations du Ministère Public.  Quand il a demandé au juge de poser certaines questions au prévenu et aux témoins à décharge, le juge a refusé, promettant que des observations pourraient être présentées à la fin. Une promesse qui n’a pas été honorée.

Pire encore, des concertations ont eu lieu entre deux témoins à décharge et le prévenu. Après avoir été entendu, le témoin X s’est concerté hors de la salle d’audience avec le témoin Y, également à décharge. C’est seulement après que ce dernier s’est exprimé devant les juges. De même, le témoin Y a pu discuter en pleine audience avec le prévenu. Ces pratiques nuisent gravement à l’établissement des faits, puisqu’accusé et témoins peuvent alors harmoniser leurs récits.

« Malgré notre signalement, les juges ont minimisé ce geste. Le témoin et le prévenu ont quand même été entendus : tous deux ont donné une nouvelle version des faits. Tout cela est arrivé devant les yeux des juges », s’étonne Me B.N.

 

Décision

Malgré les irrégularités de procédure, TRIAL espère que le verdict donnera raison à la jeune victime et punira le responsable. Il est grand temps que la justice burundaise prenne fermement position contre les exactions des militaires.

« Caritas a seulement 10 ans. Elle mérite d’obtenir justice et réparation », dit Pamela Capizzi, conseillère juridique en charge du projet Burundi de TRIAL International. « Si le système judiciaire burundais n’est pas capable de répondre au besoin de justice de la petite Caritas, il ne mérite pas non plus d’être appelé comme tel ».

Le verdict est attendu dans les prochaines semaines.

 

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