L’opportunité ratée du Burundi risque de mettre fin au dialogue

08.08.2016 ( Modifié le : 27.09.2016 )

Un op-ed de Pamela Capizzi

Le Burundi a quitté à mi-chemin son examen devant le Comité des Nations Unies contre la Torture (CAT). Nous ne pouvons que regretter cette occasion manquée d’avoir un dialogue ouvert et honnête.

La 58ème session du CAT a été remarquable pour plusieurs raisons. Premièrement, les experts ont décidé de mener un examen spécial de la situation au Burundi – cette procédure exceptionnelle n’a été utilisée qu’à deux reprises par le passé, pour Israël et pour la Syrie. Deuxièmement, en raison du coup de théâtre sans précèdent de la délégation burundaise.

Le 28 juillet, la session du CAT a débuté avec la déclaration traditionnelle de l’Etat, suivie des questions des experts. Celles-ci étaient nombreuses, détaillées et clairement tirées, entre autres, du rapport soumis cet été par la société civile. Ce rapport, auquel TRIAL International a participé, fait état de violations graves et continues des droits humains dans le pays.

En effet, depuis le mois d’avril 2015, le Burundi a été le théâtre de violences généralisées contre les opposants politiques et la société civile. La candidature du président actuel à un troisième mandat a déclenché une vague de protestations qui a été violemment réprimée. La situation s’est rapidement détériorée et a évolué en une véritable crise causant des milliers de mort et plus de 270’000 déplacés (sources ONU).

Le Burundi s’éloigne du dialogue 

Lors du deuxième jour de l’examen, les réponses du Burundi aux questions des experts étaient très attendues. Mais la délégation ne s’est pas présentée.

Certains Etats avaient déjà refusé par le passé de participer aux examens du Comité. Mais c’est la première fois, selon nos sources, qu’une délégation quitte la procédure en cours de route.

Une note adressée au Président du Comité a exprimé la surprise du Burundi face aux questions basées sur le rapport des ONG. Les délégués gouvernementaux s’étaient préparés à ce que la discussion tourne autour d’un nombre plus limité de sujets. Ils ont donc demandé « suffisamment de temps pour vérifier les dénonciations portées contre le Burundi et délibérer sur les mesures à adopter ».

Le fait que le Burundi ait refusé de coopérer avec la communauté internationale est extrêmement regrettable. Les examens des Nations Unies sont une occasion pour les Etats de s’exprimer sur leurs difficultés et recevoir des recommandations, en collaboration avec – et pas contre – la société civile et des experts qualifiés.

Les ONG jouent un rôle crucial dans la dénonciation d’abus, et l’usage minutieux de leur rapport par le CAT démontre leur légitimité. Il est vraiment dommage que les représentants burundais aient interprétés ce geste comme un affront, plutôt que comme l’opportunité de dialogue que c’était en réalité.

Le comportement du Burundi devant le CAT, ainsi que son refus récent d’autoriser le déploiement d’une force de police sur son territoire, constituent une menace à une coopération future. Nous espérons que le gouvernement reconsidérera sa position et s’engagera davantage dans un dialogue constructif avec (sa) société civile et la communauté internationale. Autrement, c’est sa population civile qui en paiera le prix.

Pamela Capizzi, Conseillère juridique
@PamelaCap1

 

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