Au cœur des enquêtes pénales de TRIAL

03.03.2017 ( Modifié le : 10.03.2017 )

Bénédict De Moerloose, responsable de la Division enquêtes et droit pénal, nous explique comment TRIAL sélectionne, constitue et dépose ses affaires pénales.

 

TRIAL : Pouvez-vous nous expliquer comment se déroulent les enquêtes à TRIAL ?

Benedict de Moerloose : TRIAL International a créé la Division enquêtes et droit pénal en 2011, afin que les personnes et entreprises soupçonnées d’avoir commis des crimes internationaux soient poursuivies par la justice.

Selon le principe de compétence universelle, les États peuvent poursuivre des individus soupçonnés de crimes graves, quel que soit le lieu où ceux-ci ont été commis. De plus en plus d’États ont recours à ce principe, mais le chemin est encore long. Bien trop souvent, les intérêts diplomatiques l’emportent sur la justice.

Grâce à son expertise en matière de droit pénal et d’enquêtes, TRIAL fait la lumière sur des affaires des plus sérieuses. En déposant des plaintes pénales et en fournissant des preuves, l’ONG peut pousser les autorités à respecter leurs obligations internationales.

 

Les enquêtes pénales ne sont-elles pas la prérogative de ces autorités ?

Bien sûr, et nous ne marchons pas sur leurs plates-bandes. Nos rôles sont complémentaires. Souvent, nous attirons leur attention sur des affaires dont ils n’ont pas connaissance. Nous sommes aussi en mesure d’accéder à des preuves qui ne sont pas forcément à la portée des autorités. Par exemple, si nous voulons nous entretenir avec un témoin potentiel, nous n’avons pas besoin de passer par des voies diplomatiques et de demander une entraide judiciaire internationale. Mais au bout du compte, seule l’autorité judiciaire peut décider d’ouvrir une enquête officielle, d’entendre les suspects et de les condamner.

En règle générale, une fois la dénonciation déposée, TRIAL ne participe pas aux procédures. Les parties impliquées sont le procureur, l’accusé et les victimes, représentées par leur avocat. Cela n’empêche pas que TRIAL puisse continuer l’enquête et fournir des preuves complémentaires aux autorités.

 

Comment TRIAL mène-t-elle ses enquêtes ?

Nous avons développé nos capacités d’enquête au fil du temps. Nos dénonciations reposent sur de véritables argumentations juridiques, avec de solides preuves à l’appui. Plus le dossier est complet, plus on a de chances que le procureur accepte de poursuivre l’auteur présumé.

Rassembler des preuves prend du temps, c’est un travail complexe et minutieux. De plus, les personnes que nous poursuivons sont souvent haut placées au sein de gouvernements ou dans l’armée. Même quand elles ne sont plus au pouvoir, elles ont le bras long et peuvent intimider ceux qui témoignent contre elles. Il est essentiel que nos sources restent confidentielles et sécurisées tout au long de l’enquête.

 

Quelles sont ces sources ?

Nos sources se trouvent tant à l’échelle locale qu’internationale. Évidemment leur crédibilité est dûment vérifiée, tout particulièrement quand il s’agit de témoins. Il nous arrive aussi de creuser un peu plus profond et de rassembler des preuves nous-mêmes : missions sur le terrain; entrevues; recherches dans les archives; etc.

 

Comment choisissez-vous les dossiers que vous entreprenez ?

Nous ne pouvons malheureusement pas prendre toutes les affaires en charge, nous avons donc établi des critères de sélection.

Si le dossier est crédible, nous examinons d’autres facteurs. Par exemple: si la juridiction est compétente concernant les crimes présumés ; si le dossier s’inscrit dans le mandat de TRIAL ; quelles sont nos chances de succès dans l’affaire ; ses dangers potentiels, etc.

Nous devons aussi penser de manière stratégique : nous ciblons les affaires qui auront un fort impact, dans des pays où l’impunité est la règle. Se concentrer sur des personnes moins haut placées serait plus facile, mais ne ferait que renforcer la problématique d’un système judiciaire à deux vitesses.

Bien entendu, nous devons aussi prendre en compte nos propres ressources. Nous ne sommes pas nombreux dans l’équipe et nous devons préserver nos forces pour pouvoir continuer à nous battre !

 

Depuis sa création, TRIAL International a porté 17 dénonciations à la connaissance des autorités suisses – individus et entreprises. Ces plaintes ont donné lieu à 10 enquêtes pénales (dont 8 sont en cours) ainsi que 2 condamnations et 1 extradition.

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