Au-delà des questions d’argent, des réparations pour tourner la page et reprendre confiance
Un rapport de TRIAL International compile les témoignages de victimes sur le thème des réparations. Il met en lumière la nécessité d’un programme national de soutien pour les victimes en Bosnie-Herzégovine.
En droit international, les victimes de crimes internationaux ont droit à des réparations. En Bosnie-Herzégovine, où il n’existe aucun système national dans ce sens, les victimes doivent faire valoir leur droit devant les cours civiles et pénales. Mais plusieurs obstacles, comme l’absence de soutien financier et d’accompagnement psychologique complet, entravent l’accès des victimes aux réparations.
Forte de plus de 8 ans d’expériences dans la représentation des victimes, TRIAL International est fière de publier son rapport Compensating Survivors in Criminal Proceedings: Perspectives from the Field (en anglais et bosnien uniquement)
Cette publication cherche à comprendre l’indemnisation du point de vue de la victime. Elle illustre les bénéfices des réparations et les difficultés des victimes à y accéder. Pendant 4 mois, l’équipe de TRIAL a interviewé des survivants, psychologues, travailleurs sociaux, professionnels juridiques, représentants du gouvernement, chercheurs et représentants d’ONG.
« Les réparations sont un sujet complexe et multidimensionnel, seule une approche pluridisciplinaire pouvait rendre compte de l’ampleur de l’expérience des survivants », explique Kyle Delbyck, auteure du rapport et collaboratrice chez TRIAL International.
Les survivants doivent jouer un rôle actif dans les procédures
L’immense majorité des victimes interviewées dans le rapport expliquent que les procédures de réparations vont bien au-delà de l’argent perçu : elles représentent un moyen de reprendre le contrôle et de clore enfin ce chapitre de leur vie. Pour certaines, les procédures de réparations sont la seule opportunité de raconter leur histoire devant une cour avec leurs propres mots.
En effet, lors de procédures pénales, les victimes sont appelées comme témoins pour répondre à des questions spécifiques. Elles ont peu de temps pour raconter leur expérience. Leur témoignage peut être remis en question par la Défense pendant le contre-interrogatoire. De ce fait, beaucoup de victimes ressortent blessées et déçues des audiences.
Les procédures d’indemnisations, au contraire, sont organisées autour des victimes et pour celles-ci. Elles sont en mesure de faire des déclarations liminaires et finales, de fournir des preuves, d’appeler des témoins, etc. « La victime a la possibilité de participer activement aux procédures et d’adresser des requêtes, lui donnant le sentiment qu’elle n’est pas qu’un rouage dans la procédure » dit Nedzla Sehic, une avocate qui représente des victimes de violences sexuelles.
Ce rôle actif peut être cruciale pour tourner enfin la page et aider les victimes à reprendre contrôle sur leur propre vie. « Pour elles, c’est le signe qu’elles ne sont plus dans une position de survivant qui ne fait qu’attendre » explique la directrice de l’ONG Medica Zenica, Sabiha Husic.
La voix des victimes comme outil de plaidoyer
Le rapport analyse également les pistes offertes aux victimes peuvent obtenir justice, et les limites de chacun de ces mécanismes. En l’absence d’un programme complet de réparation à échelle nationale, les victimes doivent se débrouiller face à un système judiciaire complexe. Nombre d’entre elles n’accèderont jamais à des réparations.
En mettant en lumière leurs lacunes et en partageant les bonnes pratiques, ce rapport est à la fois un outil de plaidoyer et de renforcement des capacités. « Nous espérons qu’il favorisera la mobilisation politique afin que même les survivants les plus vulnérables aient la possibilité d’obtenir réparation », conclut Selma Korjenic, responsable du programme BiH de TRIAL.
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