Initiative anti-droits humains : de quoi parle-t-on ?

21.11.2018 ( Modifié le : 20.12.2018 )

Dans quelques jours, le peuple suisse aura tranché. Mais à quel sujet au juste ? «Le droit suisse au lieu de juges étrangers», «initiative pour l’autodétermination», «initiative anti-droits humains», sous ces différents noms se cachent un seul et même objet de votation. Le point avec Daniel Bolomey, président du Comité de TRIAL International.

L’Union démocratique du centre (UDC), à l’origine de cette initiative, n’a eu de cesse de déplacer le débat. Dernière estocade en date, un rejet de l’initiative ferait peser une menace sur la démocratie directe et sur le « modèle suisse », et ne garantirait plus le droit de vote des citoyens à long terme.

Or il n’en est rien. L’initiative de l’UDC veut faire croire à un problème là où il n’y en a pas. Elle n’est rien de moins qu’une attaque directe contre la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH). La Suisse a ratifié la CEDH il y a plus de quarante ans et notre démocratie directe n’a pourtant pas pris une ride. Au contraire, la CEDH renforce les droits fondamentaux inscrits dans la Constitution helvétique. Car ces droits peuvent être affaiblis, notamment par des initiatives populaires aux conséquences incertaines que l’UDC brandit régulièrement, ou même par des lois fédérales, puisqu’il n’existe en Suisse aucun contrôle de la conformité des lois avec la Constitution fédérale.

Les décisions rendues par la Cour européenne des droits de l’homme n’ont pourtant pas toujours desservi les intérêts de l’UDC. Pour rappel, la Cour de Strasbourg avait cassé une décision du Tribunal fédéral dans l’affaire Perinçek en 2015. Elle avait jugé que la condamnation par la Suisse d’un nationaliste turc pour ses propos qualifiant le génocide arménien de « mensonge international » violait la liberté d’expression. Or, l’UDC s’est toujours opposée à la loi anti-raciste sur laquelle la condamnation de Perinçek se fondait.

 

Libertés menacées

Cette initiative pourrait surtout faire sauter les garde-fous qui protègent le droit à la vie, à la liberté, le droit à un procès équitable, à la protection contre les traitements inhumains, le droit à la sphère privée, à la liberté de conscience et de religion, à la liberté d’expression et d’association, le droit au mariage et à la vie de famille. Elle inscrirait la Suisse dans la tendance portée par les politiques de Trump, Poutine, Erdoğan ou Orbán.

En votant « NON » le 25 novembre, le peuple suisse manifestera son attachement aux droits fondamentaux qu’il a acquis grâce à la CEDH. En votant « NON », il évitera à la Suisse de se retrouver en porte-à-faux avec les traités qu’elle a signé. En votant « NON », il affirmera que ses droits fondamentaux ne seront pas sacrifiés sur l’autel de la démagogie et des échéanciers politiques.

 

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