Aujourd’hui, TRIAL International, en collaboration avec Civitas Maxima, le Center for Justice and Accountability (CJA), le European Center for Constitutional and Human Rights (ECCHR), la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH) et REDRESS, a publié la dernière édition du Rapport annuel sur la compétence universelle (UJAR). L’UJAR 2025 compile les développements dans 95 affaires portées sur la base de la compétence extraterritoriale et universelle et poursuivies dans 16 pays. Les chiffres montrent que la tendance positive du recours à la compétence universelle pour lutter contre l’impunité des crimes internationaux se poursuit, malgré les défis qui subsistent.

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La compétence universelle comme pilier de la lutte contre l’impunité

Cette onzième édition de l’UJAR témoigne du rôle durable de la compétence extraterritoriale et universelle en tant que pilier central de la lutte contre l’impunité. 36 nouvelles affaires ont été ouvertes ou rendues publiques en 2024, et 27 suspect·e·s ont été condamné·e·s en première instance ou en appel, soit près du double par rapport à 2023. Le Portugal a rejoint la liste de juridictions qui poursuivent activement les crimes internationaux commis à l’étranger. Des réformes législatives sur la compétence universelle ont été adoptées en Allemagne et au Danemark en 2024, qui ont respectivement renforcé et permis l’enquête et la poursuite des crimes internationaux dans ces deux pays.

L’année a également été marquée par plusieurs développements positifs dans des affaires spécifiques. En France, une cour d’appel a confirmé un mandat d’arrêt à l’encontre de l’ancien président syrien Bachar al-Assad. Dans deux autres affaires liées à l’ancien régime syrien, les autorités judiciaires françaises ont confirmé que les immunités fonctionnelles ne s’appliquent pas dans les affaires de crimes internationaux et ont prononcé des condamnations par contumace. Ces affaires illustrent l’évolution continue du cadre juridique relatif aux immunités et démontrent que les obstacles à l’accès à la justice peuvent être surmontés par la jurisprudence. En Suisse, Ousman Sonko, ancien ministre de l’Intérieur de la Gambie, a été condamné, pour crimes contre l’humanité, à 20 ans de prison, ce qui fait de lui le plus haut représentant étatique jugé en vertu de la compétence universelle devant un tribunal européen à ce jour.

Des défis persistent dans le recours à la compétence universelle

Parallèlement, le rapport souligne certains des défis rencontrés en 2024. L’absence d’enquêtes ouvertes sur la base de la compétence universelle ou extraterritoriale concernant les crimes internationaux commis à Gaza a été perçue comme une menace majeure à la légitimité de la justice pénale internationale. Même dans d’autres situations, les efforts d’enquête n’ont pas encore donné de résultats tangibles – comme dans le cas des crimes commis lors de l’invasion russe en Ukraine – et les appels à la responsabilité ne se traduisent pas toujours par des actions concrètes– comme cela a été le cas pour les crimes documentés du régime biélorusse.

Relever les défis

Malgré ces difficultés, l’UJAR identifie plusieurs initiatives que les États et leurs autorités nationales de poursuite peuvent mettre en œuvre afin de garantir l’accès à la justice des victimes et des survivant·e·s de crimes internationaux. Une première étape importante consiste à renforcer les cadres juridiques domestiques pour permettre et faciliter la poursuite des crimes internationaux sur la base de la compétence universelle. Il est également essentiel de renforcer la formation et les ressources des unités spécialisées dans les crimes internationaux au sein des autorités nationales de poursuite.

La réponse aux crimes commis en Syrie démontre l’importance des enquêtes structurelles et de la collaboration entre les organisations de la société civile – en particulier les groupes de victimes – et les autorités chargées des poursuites. La réponse aux crimes commis en Ukraine à la suite de l’invasion russe démontre le potentiel d’une justice pénale internationale coordonnée, mobilisée et coopérative. Pour garantir un accès à la justice exempt de biais politiques aux victimes et aux survivants, les leçons tirées de ces réponses peuvent et doivent être appliquées dans toutes les régions touchées par des crimes internationaux.

A propos de l’UJAR 2025

L’UJAR 2025 a été recherché et rédigé par UpRights. Il a été produit avec le soutien financier de la Ville de Genève, de l’Union européenne, de la Oak Foundation et de la Taiwan Foundation for Democracy. Le contenu du document relève de la seule responsabilité de TRIAL International et ne peut en aucun cas être considéré comme reflétant les positions des donateurs susmentionnés.

La photographie figurant sur la couverture de la publication a été réalisée par Bashar Taleb le 7 octobre 2023 dans la ville de Gaza.

Lire et télécharger le rapport UJAR 2025 (en anglais) :

UJAR 2025 cover

Pour les éditions précédentes de l’UJAR, cliquez ici. (uniquement disponibles en anglais)

Pour un aperçu plus visuel des affaires de compétence universelle de par le monde, voyez aussi notre carte interactive UJIM.

TRIAL International, en collaboration avec Civitas Maxima, le Center for Justice and Accountability (CJA), le Centre européen pour les droits constitutionnels et les droits humains (ECCHR), la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et REDRESS, a publié aujourd’hui l’édition 2024 du Rapport annuel sur la compétence universelle (UJAR). Au fil des ans, l’UJAR, qui en est à sa dixième édition, a continué à mettre en évidence le rôle de plus en plus important de la compétence universelle dans la lutte contre l’impunité. Avec 36 nouvelles enquêtes ouvertes en 2023 et 16 condamnations, l’année écoulée confirme cette tendance positive.

Universal Jurisdiction Annual Review 2024

Toutefois, comme le souligne l’article introductif de cette année, l’utilisation de cet outil de poursuite crucial ne se développe pas de manière uniforme dans tous les pays. Malgré l’intégration de dispositions relatives aux crimes internationaux dans les cadres juridiques de la majorité des pays, seules 13 juridictions nationales ont actuellement des affaires extraterritoriales en cours. Tant que les affaires resteront concentrées dans quelques juridictions spécifiques, la nature véritablement universelle et l’impact potentiel de la compétence universelle resteront inexploités.

Comme l’ont souligné les éditions précédentes de l’UJAR, la pratique de la compétence universelle est confrontée à de nombreux défis. Les efforts des organisations de la société civile (OSC) ont été déterminants pour les surmonter et permettre une expansion aussi importante. En 2023, les OSC ont été impliquées dans des procédures judiciaires dans plus de 56% des affaires en cours, en déposant des plaintes, en collaborant avec les autorités de poursuite ou en leur fournissant des informations, en apportant un soutien aux parties plaignantes et en participant en tant que parties civiles.

Grâce à la collaboration entre les OSC et les autorités de poursuite, la compétence universelle et extraterritoriale a joué un rôle essentiel dans la lutte contre les crimes commis en Syrie. L’UJAR 2024 comprend 49 affaires en cours dans neuf pays de poursuite pour des crimes internationaux commis en Syrie et dans la région frontalière de l’Irak depuis 2011. Les efforts déployés pour demander des comptes au régime syrien sont non seulement nombreux, mais aussi significatifs compte tenu du rang des suspects visés : en novembre 2023, le pôle français pour la poursuite des crimes de guerre a émis un mandat d’arrêt international contre le président syrien Bachar al-Assad (article en anglais).

L’année écoulée a également montré la nécessité d’une justice efficace et la mesure dans laquelle des retards prolongés peuvent entraver la probabilité d’arrestations, d’inculpations et de procès. Cela a été le cas dans la procédure, résumée dans le rapport, contre l’ancien vice-président syrien Rifaat al-Assad, dont le mandat d’arrêt international a été émis dix ans après la plainte pénale déposée contre lui en Suisse. Un mois seulement avant l’émission du mandat, il avait mis fin à son exil et était rentré en Syrie, où le bras de la justice ne sera probablement pas assez long pour l’atteindre. En outre, les procédures de longue durée comportent le risque d’une « impunité biologique » en raison de l’âge avancé, de la santé défaillante et du décès éventuel des suspects, des témoins et des victimes, lorsque les poursuites sont engagées des décennies après que les crimes ont été commis, comme cela s’est produit récemment en France, en Allemagne (articles en anglais) et en Suisse.

À propos du UJAR 2024

L’UJAR 2024 a été rédigé par Shoshana Levy. Il a été produit avec le soutien financier de la Ville de Genève, de l’Union européenne, de Oak Foundation et de la Taiwan Foundation for Democracy. Le contenu du document relève de la seule responsabilité de TRIAL International et ne peut en aucun cas être considéré comme reflétant la position des donateurs susmentionnés.

Télécharger l’UJAR 2024

(disponible uniquement en anglais)

Universal Jurisdiction Annual Review

Vous pouvez consulter toutes les éditions précédentes du UJAR sur notre site web.

Conflit en Ukraine et responsabilité des acteurs économiques : la compétence universelle plus que jamais au service de la lutte contre l’impunité

TRIAL International, en collaboration avec Civitas Maxima, Center for Justice and Accountability (CJA), ECCHR, FIDH et REDRESS, publie aujourd’hui l’édition 2023 du Rapport annuel sur la compétence universelle (Universal Jurisdiction Annual Review, UJAR). L’utilisation croissante du principe de la compétence universelle et extraterritoriale pour faire reculer l’impunité des crimes internationaux est soulignée par le rapport, qui récence 27 nouvelles affaires l’an dernier, sur les 93 couvertes par le UJAR. Cette tendance a été renforcée, d’une part, par la mobilisation de nombreuses autorités de poursuite nationales face aux atrocités commises sur le territoire ukrainien suite à l’invasion russe, d’autre part par des nouvelles enquêtes visant des acteurs économiques.

© REUTERS / Stringer

 

Avancées de la compétence universelle en 2022

Le UJAR recense les affaires relevant de la compétence universelle et extraterritoriale pour les crimes internationaux de génocide, crimes de guerre, crimes contre l’humanité, torture et disparitions forcées. L’année 2022 a été marquée par des avancées importantes dans ce domaine avec notamment des condamnations historiques en Allemagne (Anwar Raslan), en Suède (Hamid Noury) et en France (Kunti Kamara). Suite à ces décisions, le nombre de condamnations prononcées sur la base de la compétence universelle ou extraterritoriale recensées depuis la première parution du UJAR en 2015 s’élève à 78.

 

L’élan en faveur de l’Ukraine devrait être étendu à l’ensemble des crimes commis

Les atrocités commises suite à l’invasion russe en Ukraine ont déclenché une mobilisation sans précédent tant des autorités de poursuite nationales que des institutions internationales comme la Cour pénale internationale. Au moins 11 enquêtes ont été lancées à travers l’Europe et le Canada sur la base de la compétence universelle. Si cette mobilisation est fondamentale, elle ne doit cependant pas faire oublier le besoin de justice dans d’autres contextes.

 

CHIFFRES-CLÉS 2022

 

Les acteurs économiques sous la loupe de la justice

2022 a également vu l’augmentation des procédures judiciaires mettant en cause la responsabilité d’acteurs économiques basés en Europe pour crimes internationaux. 12 enquêtes sont en cours notamment en France, en Suède et en Suisse contre des entreprises,  leurs cadres dirigeants et/ou des hommes d’affaires concernant leur implication présumée dans des crimes internationaux. Ces applications prometteuses de la compétence universelle et extraterritoriale sont notamment le résultat d’efforts de longue date de la société civile visant à mettre tous les auteurs de crimes face à leurs responsabilités, y compris les entreprises les plus puissantes.

« L’année 2022 a été marquée par un élan sans précédent en faveur de la compétence universelle. Pour soutenir et pérenniser cet engagement des juridictions nationales dans la quête de justice, chaque État devrait plus fermement assumer ses obligations de combattre ces crimes en se dotant de ressources adéquates et de cadres législatifs appropriés », a souligné Philip Grant, Directeur exécutif de TRIAL International.

 

À propos du UJAR 2023

Le UJAR 2023 a été rédigé par Shoshana Levy. Cette publication a bénéficié du généreux soutien de la Oak Foundation, de la Taiwan Foundation for Democracy et de la Ville de Genève.

 

À propos de la compétence universelle

Le principe juridique de compétence universelle est fondé sur l’idée que les crimes internationaux sont d’une nature si grave qu’ils constituent une atteinte à tous les êtres humains et que la lutte contre l’impunité dont jouissent les responsables de ces crimes ne devrait pas connaître de frontières. En vertu de ce principe, les États ont l’obligation de poursuivre les suspects/es de crimes internationaux se trouvant sur leur territoire – et ce quelle que soit la nationalité des suspects et de leurs victimes, et indépendamment du lieu de commission des crimes.

 

Télécharger le UJAR 2023

(disponible uniquement en anglais)

Avec des développements dans plus de 60 affaires devant 16 juridictions nationales, l’année 2021 a vu la compétence universelle jouer un rôle toujours plus important pour rendre justice aux victimes de crimes internationaux. TRIAL International publie aujourd’hui, en collaboration avec Civitas Maxima, le Center for Justice and Accountability (CJA), ECCHR, la FIDH et REDRESS, le rapport annuel sur la compétence universelle (« Universal Jurisdiction Annual Review » – UJAR 2022). Tout en saluant les développements importants dans nombreuses affaires fondées sur la compétence universelle en 2021, le UJAR souligne le chemin qu’il reste à parcourir pour rendre justice aux victimes de violences sexuelles en temps de conflit. Outil puissant pour lutter contre l’impunité des crimes internationaux, la compétence universelle devrait aussi servir de recours juridique aux victimes de violences sexuelles en temps de conflit. Malheureusement, ce n’est pas encore le cas. Sur les 125 chefs d’accusation prononcés l’an dernier et recensés dans le rapport, seulement 17 concernent des violences sexuelles. Le UJAR 2022 explique pourquoi et comment la compétence universelle devrait devenir un instrument plus efficace pour rendre justice aux victimes de ces crimes.

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La compétence universelle : une justice qui dépasse les frontières

Le UJAR, qui paraît aujourd’hui, documente les affaires relevant de la compétence universelle pour des crimes internationaux, comme le génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, pour lesquelles des procédures initiées par des juges ou des procureurs sur l’ensemble de la planète ont connu des avancées en 2021. En 2021, 125 chefs d’accusation ont été prononcés, dont 34 pour crimes de guerre, 66 pour crimes contre l’humanité, 25 pour génocide. Seulement 17 accusations ont été enregistrées pour des violences sexuelles en temps de conflit.

Qu’ils s’agissent de crimes commis pendant le génocide au Rwanda ou lors de la guerre en Syrie ou encore durant l’ère Jammeh en Gambie, les autorités de poursuite nationales, grâce à la compétence universelle, disposent de moyens efficaces pour mettre les suspects/es d’atrocités face à leurs actes, et ainsi faire entendre les voix des victimes.

« La compétence universelle ne cesse de gagner du terrain. Avec 17 accusé/e/s actuellement en procès et 15 condamnations, la contribution de nombreux États à la lutte contre l’impunité pour crimes internationaux passe aussi, et de façon toujours plus importante, par ces affaires recensées dans le UJAR 2022 », explique Giulia Soldan, responsable du programme Procédures et Enquêtes Internationales de TRIAL International.

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La compétence universelle : un outil efficace, mais encore trop négligé, pour lutter contre les violences sexuelles en temps de conflit

Principe juridique désormais établi et dont la contribution à la lutte contre l’impunité est reconnue, la compétence universelle ne semble pas aussi efficace dans la poursuite des violences sexuelles commises en temps de conflit. Après avoir été longtemps négligés, ces crimes – tel que le viol, la stérilisation et la nudité forcées, ou encore l’esclavage sexuel – sont de plus en plus documentés et poursuivis. Y compris en 2021 dans des affaires liées à la compétence universelle, comme l’ont montré les deux verdicts contre le colonel syrien Anwar Raslan en Allemagne et celui contre le chef de guerre libérien Alieu Kosiah en Suisse.

Malgré ces progrès, les violences sexuelles en temps de conflit font encore trop rarement l’objet d’enquêtes et de poursuites dans les affaires liées à la compétence universelle. Les raisons sont diverses, notamment le fait que ces crimes n’ont souvent pas été été intégrés aux stratégies d’enquête et, lorsqu’ils sont poursuivis, sont souvent qualifiés d’actes de torture. Cependant, cette qualification juridique ne reflète pas leur réelle nature d’arme de guerre et leur usage stratégique qui vise à affaiblir le tissu social des communautés menacées. De plus, pour poursuivre ces crimes, les témoignages des victimes sont clés. Cependant, le risque de traumatiser une nouvelle fois les victimes et la stigmatisation à laquelle elles s’exposent en témoignant illustrent le besoin de formation spécifique du personnel judiciaire pour mener ces entretiens

« Les conséquences des violences sexuelles en temps de conflit vont bien au-delà de la souffrance individuelle des victimes. Elles affectent des communautés entières, détruisent les liens familiaux, infligent des dommages sur plusieurs générations. Le silence et l’impunité autour de ces crimes doivent cesse », déclare Valérie Paulet, consultante juridique pour TRIAL International et éditrice du rapport.

À propos de la compétence universelle

Le principe juridique de compétence universelle est fondé sur l’idée que les crimes internationaux sont d’une nature si grave qu’ils constituent une atteinte à tous les être humains et que la lutte contre l’impunité dont jouissent les responsables de ces crimes n’a pas de frontières. En vertu de ce principe, les États ont l’obligation de poursuivre les suspects/es de crimes internationaux se trouvant sur leur territoire – et ce où qu’aient été commis les crimes et quelle que soit la nationalité des suspects et de leurs victimes.

À propos du UJAR 2022

Cette publication a bénéficié du généreux soutien de la Oak Foundation, de la Taiwan Foundation for Democracy, de UKaid et de la Ville de Genève. Il a été réalisé en collaboration avec Civitas Maxima, CJA, ECCHR, la FIDH et REDRESS.

Lire et télécharger le UJAR 2022

Pour de plus amples informations sur le rapport :

Olivia Gerig, Chargée de communication et des relations médias

TRIAL International

+ 41 78 683 52 66

o.gerig@trialinterntional.org

L’année 2020 restera dans les souvenirs comme une période hors du commun. La pandémie de covid-19 a bouleversé et continue de bouleverser d’innombrables vies. Les institutions publiques du monde entier, y compris les organes judiciaires, ont dû radicalement changer leur fonctionnement et leurs priorités. Dans un contexte difficile et alors que bon nombre d’activités ont dû s’arrêter brutalement, les affaires liées à la compétence universelle sont-elles également au point mort ? Fort heureusement, loin de là.

Même une crise sanitaire mondiale n’a pas mis en péril le recours à la compétence universelle à travers le monde. © Getty Image / Loic Venance

La pandémie a certes eu un impact sur les affaires de compétence universelle, mais il s’est agi davantage d’une réorganisation que d’un arrêt complet. Comme le montre le Rapport annuel de la compétence universelle 2021 (Universal Jurisdiction Annual Review en anglais, ou UJAR) de nombreuses affaires ont avancé et de nouveaux suspects ont été interpellés. Autrement dit, même une crise sanitaire mondiale n’a pas mis en péril le recours à la compétence universelle à travers le monde – preuve, s’il en fallait, de la solidité des progrès réalisés ces dernières années (voir les UJAR précédents pour plus d’information).

« Après les premières semaines du printemps où le monde entier était déboussolé, la communauté juridique s’est rapidement adaptée » résume Valérie Paulet, consultante juridique chez TRIAL International et Editrice du UJAR. « Les procureurs, les juges et les ONG ont réagi rapidement et ont développé des méthodes créatives pour mener leur travail à bien. Leur agilité et les effort supplémentaires qu’ils ont déployé méritent d’être salués. »

 

Renforcer les enquêtes à distance

Bien évidemment, les missions de terrain ont été considérablement limitées par les confinements nationaux et les restrictions de déplacement. Les enquêtes en cours qui reposaient sur la capacité des témoins, des victimes, des enquêteurs et des juges à voyager à l’étranger ont été ralenties ou interrompues. Les ONG en particulier, dont les enquêtes reposent sur la flexibilité et l’adaptabilité, ont dû trouver de nouveaux moyens d’entrer en contact avec les victimes et les témoins. « Nous nous sommes appuyés encore davantage sur nos réseaux », explique Bénédict De Moerloose, Responsable des Enquêtes et procédures internationales chez TRIAL International. « Les partenaires locaux prenaient contact avec les victimes et les témoins et initiaient un premier dialogue, puis nous les rencontrions via des appels vidéo sécurisés. Un certain niveau de confiance était ainsi déjà établi. Un des côtés positifs est que cela nous a rapprochés encore plus de nos partenaires sur le terrain. »

Ces entretiens à distance présentent d’autres avantages : les victimes et les témoins peuvent parler depuis leur domicile, réduisant les risques qu’ils soient entendus par des tiers ou suivis. Être dans un espace familier est également réconfortant pour les personnes vulnérables, qui peuvent alors partager leurs expériences dans un cadre sécure. Dans certains cas, les objets qui les entouraient chez eux ont suscité des souvenirs qui ont aidé à reconstituer les faits.

Du côté des enquêteurs, les entretiens à distance permettaient de s’entretenir en une seule journée avec des témoins établis partout dans le monde, accélérant considérablement leur travail. A une condition essentielle : redoubler d’efforts pour garantir la compréhension, le consentement et, bien sûr, la plus grande sécurité des personnes interrogées.

 

Récolter les fruits des années précédentes

Outre les enquêtes, 18 nouvelles affaires ont été ouvertes 2020, portant le nombre total de procès en cours à 30. Par exemple, le procès le plus important de ces dernières années, contre les Syriens Anwar R. et Eyad A., s’est ouvert en Allemagne. Cette affaire a fait les unes du monde entier et a été unanimement saluée comme une avancée majeure contre l’impunité des crimes d’État. Parmi les autres procès très médiatisés figurent ceux de Fabien Neretsé en Belgique, de Roger Lumbala en France et d’Alieu Kosiah en Suisse.

Lire ou télécharger le UJAR 2021

La plupart des nouvelles affaires de 2020 ont pu s’ouvrir grâce aux missions d’enquête et de collecte de preuves menées les années précédentes. La pandémie et ses conséquences ont souligné la nécessité d’enquêter rapidement et minutieusement tant que le contexte est favorable, pour que les affaires puissent progresser lorsque/si la situation évolue. Cette leçon s’applique également aux enquêtes dans des zones instables ou dangereuses, qui peuvent devenir inaccessibles en l’espace de quelques jours.

L’année 2020 a été un sombre rappel de nos limites. Les considérations sanitaires se sont désormais ajoutées aux nombreuses difficultés liées à la compétence universelle. Mais malgré tout cela, les affaires présentées dans ce UJAR prouvent que les États ont relevé le défi et que la justice continuera de prévaloir.

 

Lire ou télécharger le UJAR 2021

 

Cette publication a bénéficié du généreux soutien de la Taiwan Foundation for Democracy, de la Oak Foundation, du Foreign, Commonwealth & Development Office du Royaume-Uni et de la Ville de Genève. Il a été réalisé en collaboration avec REDRESS, le European Center for Constitutional and Human Rights, la Fédération internationale des droits de l’homme, le Center for Justice and Accountability et Civitas Maxima.

 

Le dernier Rapport annuel sur la compétence universelle (UJAR) salue l’augmentation des affaires fondées sur la compétence universelle dans le monde entier. Il souligne aussi une tendance alarmante : la poursuite d’atrocités en tant que terrorisme, et non en tant que crimes internationaux.

Poursuivre les atrocités comme crimes internationaux, et non comme terrorisme, a des conséquences directes pour les victimes. © Nicole Tung

En 2019, la compétence universelle a gagné du terrain. L’année écoulée a vu un nombre sans précédent d’affaires fondées sur ce principe : 16 pays ont des poursuites en cours, 11 accusés sont actuellement devant la justice et plus de 200 suspects pourraient bientôt l’être également.

Lire le Rapport annuel sur la compétence universelle 2020 (en anglais)

La compétence universelle est désormais un principe juridique bien établi, aussi le débat a-t-il évolué. La question n’est plus s’il faut en faire usage, mais comment l’utiliser au mieux. Et un phénomène inquiétant est en train d’émerger…

 

Charges de terrorisme ou de crimes internationaux ?

La lutte contre le terrorisme est devenue une priorité politique pour de nombreux gouvernements, et les poursuites pour terrorisme ont crû en conséquence. Mais, compte tenu de ressources limitées, cela a eu une incidence négative sur les poursuites pour crimes internationaux.

Un détail ? Pas du tout. Les conséquences sont bien réelles : d’abord, le spectre de crimes poursuivis est réduit car les charges de terrorisme sont moins inclusives que celles de génocide, crimes de guerre ou crimes contre l’humanité. Ce qui est compris comme « terrorisme » varie également beaucoup d’un pays à l’autre.

« Le terrorisme n’a pas de définition internationalement reconnue » commente Valérie Paulet, Éditrice du UJAR. « Contrairement aux crimes de génocide, de torture, de crimes de guerre ou de disparitions forcées, aucun traité international ne définit clairement le terrorisme. En conséquence, chaque État a inventé sa propre définition, souvent influencée par l’actualité et l’opinion publique. »

 

Des bases juridiques bien distinctes

Autre conséquence : les victimes sont moins présentes dans les procédures, puisque le terrorisme est avant tout une atteinte à un État, et non à des individus. Difficile à justifier pour tant de survivants, pour qui accéder à la justice est un moyen de tourner la page.

L’absence de consensus sur la définition du terrorisme a une autre conséquence plus insidieuse. Elle ouvre la porte à l’arbitraire étatique, alors que les traités qui codifient les crimes internationaux (comme les Conventions contre le génocide ou les Conventions de Genève) sont précisément fondés sur la collégialité et l’édiction des standards les plus rigoureux. Autrement dit, la tendance actuelle pourrait in fine ébranler les fondements de notre droit international au lieu de la renforcer.

La volonté sans précédent des États à punir les pires atrocités est extrêmement positive. A présent, les autorités ne doivent pas céder aux pressions politiques et les poursuivre uniquement sous des charges de terrorisme. Avec le soutien de la société civile, et sur des bases rigoureuses issues du droit international, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre et de génocide doivent être poursuivis pour ce qu’ils sont. Ni plus, ni moins.

Lire le Rapport annuel sur la compétence universelle 2020 (en anglais)

 

Le Rapport annuel sur la compétence universelle (UJAR) est la principale publication juridique de TRIAL International. Il a été rédigé par Valérie Paulet, en collaboration avec REDRESS, le European Center for Constitutional and Human Rights (ECCHR) et la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH). Il a bénéficié du généreux soutien de la Ville de Genève, de la Oak Foundation et de la Taiwan Foundation for Democracy.

TRIAL International a le plaisir de présenter son cinquième Rapport annuel sur la compétence universelle (ou UJAR, pour Universal Jurisdiction Annual Review). A travers l’analyse de 60 affaires dans 16 pays, le Rapport prouve l’efficacité de la compétence universelle contre l’impunité. En 2018, elle a permis de mettre face à leurs actes plus de 140 suspects de crimes les plus graves.

Ces développements positifs sont d’autant plus remarquables au vu des nombreux obstacles politiques, juridiques, logistiques et budgétaires inhérents aux affaires de compétence universelle. Le UJAR 2019 met l’accent sur les difficultés d’enquêter et de punir les crimes de masse à distance. Il passe également en revue les solutions imaginatives déployées pour y faire face.

« Nous souhaitons faire du UJAR un outil pratique pour essaimer les bonnes pratiques et donner des idées aux acteurs judiciaires qui font usage, ou pensent faire usage, de la compétence universelle » explique Valérie Paulet, Coordinatrice de projet chez TRIAL International. « Nombre des affaires présentées dans le Rapport comportent des leçons susceptibles d’être transposées à d’autres contextes. »

Le UJAR illustre également l’importance de la coopération dans les affaires de compétence universelle. Survivants, procureurs, avocats, enquêteurs, diasporas, ONG et médias apprennent à travailler ensemble, parfois de manière inattendue, pour offrir aux victimes les meilleures chances d’obtenir justice.

Lire ici le UJAR complet (en anglais)

 

Le Rapport annuel sur la compétence universelle (UJAR) est la principale publication juridique de TRIAL International. Fruit d’une collaboration avec REDRESS, le European Center for Constitutional and Human Rights (ECCHR), la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH) et la Fondation internationale Baltasar Garzón (FIBGAR), il a bénéficié du généreux soutien de la Ville de Genève, de la Oak Foundation et de la Taiwan Foundation for Democracy.

 

Lire le UJAR 2018

Lire le UJAR 2017

Lire le UJAR 2016

Lire le UJAR 2015

La compétence universelle gagne du terrain. Dans leur rapport Make way for justice #4, TRIAL International et ses partenaires FIDH, ECCHR, REDRESS et FIBGAR illustrent cet élan international au travers de 58 affaires impliquant 126 suspects.

 

126 INDIVIDUS POURSUIVIS POUR LES CRIMES LES PLUS GRAVES

La lutte contre l’impunité a rarement connu un tel dynamisme. En 2017, des pays d’Afrique, d’Europe, d’Amérique du Nord et d’Amérique latine ont resserré l’étau sur les criminels de guerre en recourant à la compétence universelle.

Ce principe permet aux Etats de poursuivre les suspects de crimes internationaux, tels que génocide, crimes de guerre ou crimes contre l’humanité, indépendamment de leur nationalité ou du lieu où le crime a été commis.

Pour faire face aux défis propres à la compétence universelle, de nombreux Etats ont mis en place des unités de crimes de guerre. Pas plus tard que l’année dernière, ces unités spécialisées auraient enquêté, poursuivi ou traduit en justice 126 suspects des crimes les plus graves.

Bien d’autres dossiers sont en cours d’instruction. « Les Etats qui octroient suffisamment de ressources aux unités spécialisées sont à la pointe du combat contre l’impunité, transformant la justice en action concrète. » commente Valérie Paulet, coordinatrice de Trial Watch et auteure du rapport.

 

RENFORCEMENT DE LA LUTTE CONTRE L’IMPUNITÉ

Le rapport Make way for Justice #4 identifie également les prérequis de tels succès. Les unités spécialisées efficaces ont en commun de disposer de suffisamment de ressources, de personnel, et de bénéficier d’un niveau supérieur d’autonomie. Elles peuvent en outre compter sur l’expertise de différents départements, tels que ceux de la police ou de l’immigration.

A l’inverse, le Royaume-Uni, par exemple, a fusionné le mandat de cette unité avec celui de la lutte contre le terrorisme. Le travail de l’unité suisse est, quant à lui, limité du fait que ses ressources soient partagées avec celles de l’entraide judiciaire.

Philip Grant, directeur de TRIAL International, insiste sur le besoin d’améliorer la cohérence et l’efficacité dans l’instruction des dossiers relevant de la compétence universelle. « La poursuite des crimes de guerre exige à la fois des ressources appropriées et de l’indépendance. Nous appelons les Etats qui tardent à mettre en oeuvre la compétence universelle à doter leurs autorités de poursuite des moyens adéquats pour accomplir leur mission. »

 

Découvrez le rapport

 

 

En savoir plus sur la compétence universelle

Qu’est-ce que la compétence universelle ?
Lire Make way for Justice #3 (2017)
Lire Make way for Justice #2 (2016)
Lire Make way for Justice #1 (2015)

 

La compétence universelle a connu un essor sans précédent en 2016. Dans leur nouveau rapport, TRIAL International et ses partenaires REDRESS, FIDH, ECCHR et FIBGAR reviennent sur son application au travers de 47 affaires.

Cinq ans de conflit, des centaines de milliers de morts. En Syrie, des crimes de guerre ont été commis à grande échelle, en toute impunité. Les efforts de poursuites internationales sont restés un vœu pieu. Pourtant, la justice a trouvé une voie : la compétence universelle.

Grâce à ce principe, les Etats peuvent poursuivre des criminels, indépendamment de leur nationalité ou du lieu de commission du crime. L’intérêt de telles procédures pour des régions de non-droit est évident.

L’année dernière, cinq Etats ont ouvert des procédures pour des crimes allégués en Syrie. Des enquêtes sont en cours dans trois autres pays. Pour les victimes, il pourrait s’agir de leur unique chance d’obtenir justice.

La compétence universelle s’est révélée un outil efficace contre l’impunité en Syrie, mais elle s’applique à de nombreux autres cas, tels que le Rwanda, le Népal, le Guatemala ou encore l’Irak.

 

47 affaires phare en 2016

Pour illustrer cette mise en œuvre, TRIAL International, REDRESS, la FIDH, ECCHR et FIBGAR publient aujourd’hui leur rapport annuel sur la compétence universelle, Make way for Justice #3.

En 2016, 13 Etats ont fait usage de ce principe dans 47 affaires – un succès sans précédent. « Nous avons constaté une augmentation de 30% par rapport à l’année 2015. Un chiffre qui souligne l’essor jusqu’ici sans précédent de la compétence universelle », explique Valérie Paulet, Consultante juridique chez TRIAL International et auteure du rapport.

Make way for Justice #3 illustre la nécessité pour les États de créer des unités spécialisées et de les doter de ressources suffisantes. « Toutes les affaires présentées dans le rapport prouvent que la justice peut être mise en oeuvre lorsque les États s’en donnent les moyens », conclut Philip Grant, Directeur de TRIAL International.

 

Découvrez le rapport

 

En savoir plus sur la compétence universelle

Qu’est-ce que la compétence universelle ?
Lire Make way for Justice #2 (2016)
Lire Make way for Justice #1 (2015)

 

Make Way for Justice #2 : Rapport annuel sur la compétence universelle 2016

Les ONG TRIAL, FIBGAR, ECCHR et la FIDH publient pour la deuxième année consécutive un rapport annuel sur la compétence universelle. Make way for Justice #2 offre un panorama des affaires pénales qui, en 2015, ont illustré ce principe au potentiel inexploité.

L’année 2015 a vu s’ouvrir le procès le plus attendu de notre époque : celui du dictateur tchadien Hissène Habré. Après plus de 30 ans d’impunité, il doit enfin répondre des atrocités qu’il a infligées à son peuple. Ce procès historique doit son existence à un outil juridique unique : la compétence universelle.

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Make Way for Justice : Rapport annuel sur la compétence universelle 2015

TRIAL, ECCHR et la FIDH publient pour la première fois un bilan annuel sur les principales affaires de compétence universelle. « Make Way for Justice » fait le tour de toutes affaires qui ont connu des développements majeurs en 2014. 37 cas pour mieux comprendre le potentiel de ce principe encore trop peu exploité en matière de lutte contre l’impunité.

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