Journée mondiale de la justice internationale : scepticisme et critiques bienvenus !

17.07.2019 ( Modifié le : 30.07.2019 )

Alors que nous célébrons la 21e Journée mondiale de la justice internationale, il est indéniable que cette date a perdu un peu de son éclat. La CPI, et la justice transitionnelle en général, sont régulièrement attaquées… que reste-t-il donc à célébrer ?  Pour TRIAL International, ces critiques sont en réalité un signe de force, et peuvent même être un atout pour la lutte contre l’impunité.

La Cour pénale internationale. ©Flickr

La première Journée de la justice internationale a été célébrée le 17 juillet 1998, le jour de la signature du Statut de Rome qui a marqué la naissance de la Cour pénale internationale (CPI) – un jalon historique intervenu dans une période où la justice internationale était porteuse de grands espoirs.

Deux décennies plus tard, la situation a bien changé. Le populisme gagne du terrain et la justice internationale n’est désormais plus une priorité. La CPI est accusée d’être partiale et inefficace. Plusieurs pays ont menacé de se retirer, et l’un d’entre eux, le Burundi, l’a fait pour de bon.

Pourtant, dans un entretien accordé à la International Bar Association (en anglais), la procureure de la CPI Fatou Bensouda a déclaré qu’elle n’était pas surprise par les critiques auxquelles son institution était confrontée : « Il y a un phénomène de rejet (…) parce que la CPI fait son travail. Une résistance de la part de ceux qui se sentent ciblés est inévitable. »

Se pourrait-il que l’opposition à la lutte contre l’impunité, de manière contre-intuitive, soit un signe de son succès ? Après tout, un système inefficace ne serait pas perçu comme une menace. « Une justice internationale forte dérange », confirme Philip Grant, Directeur exécutif de TRIAL International. « Les États qui ont soutenu la création de la CPI pensaient peut-être que leur propre création ne se retournerait pas contre eux (…). Combien de pays ont renouvelé leur soutien indéfectible à la Cour après qu’elle eut inculpé ses gouvernants ? Aucun. »

Sous cette perspective, les âpres critiques à l’encontre de la justice internationale ne semblent pas de si mauvais augure. Mais pourraient-elles même être bénéfiques à la cause ?

 

« La résistance est une partie normale du processus »

La chercheuse Dr. Briony Jones partage le constat de Fatou Bensouda. « La justice transitionnelle (…) touche au contrat social, à la citoyenneté, la démocratie, la représentation… Il n’est donc pas surprenant qu’elle se heurte parfois à de la résistance ou au scepticisme. »

Mais Briony Jones va encore plus loin et nous encourage à écouter ces critiques : « La résistance a traditionnellement été perçue comme négative, mais je pense que c’est une partie normale du processus et qu’elle peut même être constructive. Les processus de justice post-conflit sont pilotés par une minorité de personnes détentrices du pouvoir, qui se conforment souvent à la doctrine dominante. Il devrait aussi y avoir un espace pour les interprétations alternatives et les voix dissidentes. »

En d’autres termes, comme en politique, l’ouverture aux critiques est un signe de force et non de faiblesse. Seuls les systèmes peu confiants ont besoin de réprimer et d’étouffer leurs opposants. Alors qu’il entre dans sa troisième décennie, le système judiciaire international est suffisamment solide pour faire face aux objections.

La prochaine étape, selon Briony Jones ? « Les ONG doivent (…) remettre en question leurs propres postulats et perceptions concernant la justice transitionnelle et rester aussi ouvertes et coopératives que possible, y compris avec les acteurs qui ont des points de vue différents. (…) Si les ONG cessent de considérer ces acteurs comme des menaces et commencent à les écouter, la justice transitionnelle n’en sera que plus forte, plus crédible et plus efficace. »

Lire l’entretien complet avec Briony Jones

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