Alors que la négation du génocide, de la Shoah, des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre sont véhiculés par une part croissante de la classe politique en Bosnie-Herzégovine (BiH), il est temps d’interdire ce type de discours dans la sphère publique. TRIAL International et ForumZFD ouvrent le débat en publiant un nouveau rapport, que les deux organisations ont présenté à Sarajevo le 25 février 2020.

En Bosnie-Herzégovine, il est courant que les crimes de guerre soient niés, minimisés, voire justifiés, dans le discours public. Leurs auteurs – quand bien même ceux-ci ont été condamnés – sont glorifiés publiquement sans qu’aucune sanction ne soit prise. Les rhétoriques nationalistes qui font l’apologie de ces crimes et de leurs auteurs sont plus répandues que jamais, au point de dominer l’espace public. A tel point que certaines élites politiques de premier plan osent ouvertement les soutenir.

 

Le négationnisme n’est pas une fatalité

ForumZFD et TRIAL International sont convaincus que les discours qui attisent la haine n’ont pas leur place dans la sphère publique, et que le négationnisme doit être sanctionné par un cadre juridique. Les deux organisations publient « Calling War Atrocities by their Right Name », un rapport pour initier un dialogue sur l’importance d’encadrer la parole publique, lorsqu’il s’agit des crimes les plus graves. Une table ronde en présence de l’auteure du rapport, de membres de la faculté de droit de Sarajevo et d’associations ainsi que du directeur du Balkan Investigative Reporting Network a réuni plus de 100 personnes le 25 février 2020.

« ForumZFD et TRIAL International souhaitent attirer l’attention sur ces faits malheureusement quotidiens dans notre société et encourager une conversation constructive sur ce sujet. Le discours public doit changer radicalement », a déclaré Selma Korjenić, la responsable du bureau de TRIAL International en BiH. En novembre de l’année dernière, elle s’était déjà exprimée sur cette thématique lors de son allocution devant le Conseil de Sécurité des Nations Unies.

 

Pas d’impunité pour les discours haineux

Une législation qui interdirait et sanctionnerait la négation du génocide, de la Shoah, des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre permettrait de lutter contre cette culture de l’impunité bien implantée.

« Nous sommes convaincus que toute société doit faire face à son passé, aussi douloureux soit-il. Cependant, cela ne suffit pas, car même lorsque des crimes de guerre font l’objet de procès, l’existence de ces crimes est niée en public. C’est ainsi que le conflit se poursuit », a déclaré pour sa part Judith Brand, Directrice de l’ONG ForumZFD en Bosnie-Herzégovine. Elle a ajouté que le travail concerté dans les domaines de l’éducation, de la culture, des médias et de l’activisme est fondamental pour traiter cette question de manière adéquate.

 

Consultez le rapport dans son intégralité (en anglais)

Un message de Daniele Perissi

 

Chers amis,

Comment un pays peut-il sortir de l’engrenage de la violence ? Quels recours pour les communautés qui en paient le prix fort ? Malheureusement, telles sont les questions auxquelles est confrontée la population du Kasaï en République démocratique du Congo (RDC). Cette région frontalière de l’Angola, pourtant riche en ressources naturelles, est l’une des plus pauvres et violentes du pays.

Au Kasaï, les victimes se méfient du système judiciaire en place et craignent la stigmatisation. © Will Baxter

Entre 2016 et 2017, cette violence récurrente a causé la mort de plus de 3’000 personnes dont les corps ont été retrouvés dans plus de 80 fosses communes. Des milliers de cas de torture et de viols ont également été signalés. Les responsables de ces crimes n’ont pour la plupart pas été poursuivis, car les victimes se méfient du système judiciaire en place et craignent la stigmatisation. Ces éléments sont autant d’entraves au processus de justice, laissant ces atrocités se dérouler en toute impunité.

Cette année, TRIAL International en partenariat avec l’organisation Physicians for Human Rights (PHR) s’investit pour la première fois dans cette région pour lutter contre l’ampleur et la gravité des crimes commis. Cette collaboration au niveau juridique et médico-légal nous permet de faire des ponts entre le droit et la médecine de manière à mieux accompagner les victimes de crimes internationaux. Si le mandat de nos organisations diffère, elles se complètent pour garantir un soutien inclusif aux victimes.

Vous pouvez nous aider à faire une différence

En tant que Responsable du programme Grands Lacs au sein de TRIAL International, je suis très ému de pouvoir lancer ce nouveau projet au Kasaï et étendre ainsi la lutte contre l’impunité en RDC. Au cours des trois prochaines années, nous espérons accompagner des centaines de victimes sur la voie de la justice et des réparations. En parallèle, nous allons former un large éventail d’acteurs locaux au Kasaï de manière à renforcer leurs capacités à utiliser les outils de la lutte contre l’impunité.

Nous ne pourrions pas mener ce travail de longue haleine sans votre soutien, et nos succès sont aussi les vôtres. Au nom de toute l’équipe de TRIAL International, je vous remercie de votre généreux soutien en 2019 et j’espère pouvoir vous compter parmi nos fidèles partenaires cette année encore !

Avec mes meilleurs messages,

Daniele Perissi

Responsable du programme Grands Lacs

 

 

La Commission et la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples sont des mécanismes régionaux qui protègent les libertés fondamentales des individus sur le continent africain. TRIAL International cherche à évaluer si elles pourraient représenter un espoir pour les victimes au Burundi.

Malheureusement, les écueils du système judiciaire burundais sont de notoriété publique. ©Landry Nshimiye

L’inefficacité du système judiciaire burundais est de notoriété publique. En ouvrant une enquête sur le pays en 201, la Cour pénale internationale (CPI) a jugé que le critère de complémentarité était rempli – en d’autres termes, qu’il était nécessaire que la Cour intervienne en complément le système judiciaire national.

Partant de ce constat, TRIAL International a concentré ses procédures judiciaires stratégiques en faveur des victimes burundaises sur des instances supranationales. Ses formations aux avocats et aux défenseurs des droits humains locaux insistent également sur les poursuites devant les organes onusiens et régionaux. L’un de ceux-ci est la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) et son organe complémentaire, la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (ci-après « Cour africaine »).

En savoir plus sur les voies de justice possibles en dehors du Burundi

 

Que sont la Commission et la Cour africaines ?

La CADHP a été créée en 1987 pour assurer la protection et la promotion de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. Comme 53 autres États, le Burundi est partie à la Charte africaine et reconnaît donc l’autorité des décisions de la CADHP. Cependant, ces décisions sont comparables à celles rendues par les Nations Unies : quasi-judiciaires et dépourvues de mécanismes de mise en œuvre. Le Burundi a ignoré ce type de décisions dans le passé, et la communauté internationale ne dispose pas d’autres outils que la pression politique pour pousser les autorités à agir.

La Cour africaine complète le mandat de la CADHP. Ses jugements peuvent condamner des États parties s’ils violent les droits humains inscrits dans la Charte. Malheureusement, la possibilité pour les survivants de saisir la Cour africaine n’est pas automatique : l’État poursuivi doit avoir formellement reconnu la compétence de la Cour, or ce n’est pas le cas du Burundi. Les victimes burundaises – individus et ONG – n’ont donc pas d’accès direct à ce qui est sans doute le plus grand espoir de recours dans la région.

 

Des moyens détournés de saisir la Cour africaine

Malgré cela, il existe un moyen de poursuivre un État devant la Cour africaine, même si celui-ci ne reconnaît pas sa compétence. La Commission africaine elle-même peut renvoyer une affaire devant la Cour, contournant ainsi l’impossibilité pour les victimes de le faire elles-mêmes.

TRIAL International a exploré cette possibilité et a soumis à la CADHP plusieurs affaires qui pourraient être renvoyées devant la Cour africaine. La procédure est longue et complexe : des critères juridiques doivent être remplis et, in fine, la CADHP détient un pouvoir discrétionnaire sur les renvois. Mais l’effort en vaut la peine : « A notre connaissance, la Cour africaine n’a jamais examiné une affaire relative au Burundi », explique Pamela Capizzi, responsable des activités burundaises. « Qu’une procédure soit ouverte serait déjà un grand pas en avant pour les victimes. Et si les juges condamnaient le Burundi, cela ajoutera un poids considérable aux revendications des ONG burundaises et internationales qui dénoncent l’impunité généralisée. »

En savoir plus sur le contentieux stratégique de TRIAL International

 

Une opinion de Philip Grant

Dans la lutte contre l’impunité, les ONG ont un rôle nécessairement différent, souvent complémentaire, à celui des acteurs institutionnels ou académiques. Comment cette complémentarité s’exprime-t-elle ? Et que signifie-t-elle pour les droits des victimes à la justice, à la vérité et aux réparations ?

« Sans les ONG, la compétence universelle ne serait qu’un intéressant concept juridique« , Philip Grant (à droite) à l’Université Panthéon-Assas (Paris), le 31 janvier 2020. ©TRIAL International

La société civile joue indéniablement un rôle important et croissant dans le combat contre l’impunité : dénonciation des crimes, création et amélioration des cadres juridiques de poursuite ou encore mobilisation du public contre l’inaction des autorités. Paradoxalement, avec leurs moyens très inférieurs aux acteurs « officiels » de la justice internationale, les ONG disposent aussi de leviers d’actions plus variés et plus nombreux. Petit passage en revue.

 

Collecte de preuve et procédures alternatives

Premièrement, le rôle des ONG dans la constitution de dossiers. On voit émerger depuis quelques années une nouvelle catégorie d’acteurs non étatiques se spécialisant dans la recherche de preuves, dans la documentions des crimes, dans la collecte de témoignages, ou même dans la localisation des suspects.

L’ONG eyeWitness, avec laquelle collabore TRIAL International, a par exemple développé une application pour enregistrer des preuves de crimes, tout en pouvant ensuite en garantir leur traçabilité et leur exploitation en procès.

Deuxièmement, les ONG ont une flexibilité qui leur permet d’exploiter la complémentarité des moyens d’action juridique eux-mêmes. La lutte contre les crimes internationaux n’est pas toujours servie au mieux par le traditionnel procès pénal. Des procédures civiles, administratives ou constitutionnelles peuvent s’avérer plus efficaces, ou simplement être les seules disponibles.

A titre d’exemple, on peut penser au contentieux administratif douanier sur la livraison de biens à double usage : l’exportation de composants chimiques suspects vers la Syrie, malgré l’embargo international sur ces composants chimiques, en est une illustration récente.

 

L’essor de la compétence universelle

Troisième axe dans lequel les ONG jouent assurément un grand rôle : l’activation de nouvelles juridictions nationales, au travers de la compétence universelle. Ce principe connait un regain d’attention depuis quelques années, en conséquence surtout de l’incapacité de la communauté internationale d’apporter la moindre réponse judiciaire aux horreurs commises en Syrie. Notre Rapport annuel sur la compétence universelle (UJAR) recense, pour 2018 seulement, 150 enquêtes et 17 procès fondés sur ce principe.

Dans la majorité de ces cas, ce sont des ONG qui ont retrouvé la trace des suspects, enquêté sur ces affaires, les ont dénoncées aux autorités, et souvent défendent les victimes au procès. Il n’est pas faux de dire que sans les ONG, la compétence universelle ne serait qu’un intéressant concept juridique, alors qu’il s’agit aujourd’hui de l’une des plus grandes potentialités juridiques dans la lutte contre l’impunité.

 

Au-delà du procès pénal

Le dernier axe, certainement le moins abouti pour le moment, porte sur la complémentarité entre les différentes prétentions juridiques des victimes. La lutte contre l’impunité est très largement perçue par le seul prisme du procès pénal. Les ONG doivent cependant fréquemment, dans leurs rapports avec les victimes qu’elles défendent, rechercher de manière plus fine de répondre à leurs attentes.

Il est fort possible que les personnes affectées préfèrent, temporairement ou durablement, ne pas prendre part au processus pénal… sans pour autant renoncer à ces autres prétentions que sont la vérité, les réparations, et la protection contre de futures violations. Les ONG sont peut-être les premières, souvent avec l’appui du monde académique, à tenter de favoriser l’extension du domaine de la lutte contre l’impunité, à d’autres prétentions juridiques que le seul droit à la justice pénale. TRIAL International lutte par exemple pour faire avancer le droit aux réparations. C’est souvent un aspect négligé, mais ô combien important pour les victimes, qui va au-delà d’une indemnisation.

Nous devrions aussi penser à ouvrir un nouveau champ d’action, peu traité à ce jour, visant à empêcher la promotion d’un militaire soupçonné de violations, ou encore à sanctionner un juge ou un médecin couvrant des actes de torture ou de disparitions forcées.

Il y a tant d’autres manières d’agir, des dénonciations publiques aux amicus curiae, qu’il serait fastidieux d’en faire le tour. Il est suffisant ici de rappeler que les ONG, dans le domaine de la lutte contre l’impunité, œuvrent à bien d’autres niveaux que seulement celui des affaires concrètes. Sans ce travail fondamental, il est évident que la justice pénale internationale serait bien moins efficace qu’elle ne l’est aujourd’hui.

 

Cette Opinion est extraite de la présentation de Philip Grant aux Cinquièmes journées de la justice pénale internationale de l’Université Panthéon-Assas (Paris) le 31 janvier 2020.

 

 

Portraits de bénévoles #7

Depuis 2018, 12 bénévoles sont exclusivement dédiés à la traduction du site de TRIAL International. Pour les remercier de leur engagement précieux, la série « Portraits de bénévoles » leur donne la parole. Dans ce dernier épisode, Marine Bloch revient sur son parcours bénévole et professionnel dans le domaine pénal.

« Mon expérience en tant que bénévole traductrice au sein de TRIAL International est déjà un atout professionnel. » ©TRIAL International

 

Depuis quand êtes-vous bénévole chez TRIAL ?

Je traduits pour TRIAL depuis mars 2017. C’est une amie de Master, elle-même bénévole à l’époque, qui m’en a parlé. Je connaissais déjà l’ONG depuis 2011, via mes études à l’université de Genève. Ma faculté était à deux pas des locaux de TRIAL !

Dès le début de mon bénévolat, j’ai pu préciser le nombre d’heures que je désirais mettre à disposition. La charge de travail est donc tout fait adaptée à mon emploi du temps.

 

Justement, que faites-vous maintenant ?

Je vis actuellement à Montréal et travaille au Centre international pour la prévention de la criminalité (CIPC). J’apporte également mon soutien à la coordination du Réseau d’échange et soutien aux actions locales (Résal), un réseau qui encourage le développement ou l’amélioration d’initiatives locales contre l’intimidation, l’exploitation sexuelle, l’adhésion aux gangs de rue et la radicalisation.

Suisse d’origine, j’ai effectué mon bachelor en relations internationales à l’université de Genève. C’est lors d’un échange universitaire à l’université de Montréal que je me suis découvert une passion pour la criminologie. J’ai donc poursuivi mes études avec une maîtrise en droit en criminologie et sécurité à l’université de Lausanne.

Avant de prendre mon poste actuel, j’ai été stagiaire analyste à l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) en France, où je me suis spécialisée sur les homicides et leur classification statistique. J’ai également été intervenante sociocommunautaire au sein de la Fondation officielle de la jeunesse, une organisation suisse qui accueille, soutient et accompagne les jeunes adultes en difficulté.

D’un point de vue un peu plus personnel, mes centres d’intérêts sont aussi éclectiques que changeants. M’improvisant artiste peintre un jour, je me sens skieuse professionnelle un autre.

 

 

Pensez-vous que votre expérience comme bénévole pourrait vous servir dans votre carrière ?

Mon expérience en tant que bénévole traductrice au sein de TRIAL International est déjà un atout professionnel. À mon poste actuel, il m’arrive de devoir traduire des documents ou de corriger les traductions des membres de l’équipe.

 

Quels aspects de la mission de TRIAL vous parlent le plus ?

En tant que premiers intervenants, les acteurs de terrain sont un maillon crucial de la chaine d’action. Parce qu’ils sont en contact avec les populations locales, ils sont les mieux placés pour rendre compte de la transversalité des enjeux. C’est pourquoi les formations dispensées auprès des divers acteurs investis dans la lutte contre l’impunité (avocats, procureurs, journalistes et ONG) me semblent indispensables à la réussite de tous programmes. L’action concertée entre les réseaux locaux et TRIAL International est un modèle très porteur.

 

L’ancien président gambien, Yahya Jammeh, semble manœuvrer pour s’assurer un retour en Gambie. TRIAL International signale que l’ex-président ne peut jouir d’immunité au regard du droit international. Au côté de 19 ONGs et associations issues de la campagne Jammeh2justice, elle rappelle que les accusations contre l’ancien chef d’État sont trop graves pour envisager un tel scenario.

« Si l’ex-président Yahya Jammeh revient un jour au pays, il fera l’objet d’une arrestation immédiate et sera accusé des charges les plus graves », a réaffirmé le ministre de la justice gambien. ©TRIAL International

En 2017, Yahya Jammeh cède le pouvoir après 22 ans de régime autoritaire et s’exile en Guinée Équatoriale. Dernièrement, l’ex-président aurait commencé à préparer le terrain pour son éventuel retour en Gambie, en revenant sur une déclaration de 2017 négociée lors de son départ du pouvoir. Toutefois, le document en question – non ratifié par les autorités gambiennes – ne prévoit aucune sorte d’immunité pour l’ex-chef de l’Etat, soupçonné entre autres de torture, violences sexuelles, exécutions extrajudiciaires et crimes contre l’humanité. La déclaration souligne uniquement que les droits fondamentaux de l’ex-président doivent être respectés – au même titre que n’importe quel citoyen gambien –, y compris l’accès à un procès équitable. Mais en aucun cas une exemption de poursuites judiciaires.

Par ailleurs, la justice transitionnelle gambienne, notamment par la voix de la Commission vérité, réconciliation et réparation (Truth, Reconciliation and Reparation Commission, TRRC) a déjà permis de faire la lumière sur les multiples violations des droits humains commis par le régime de Yahya Jammeh. Selon TRIAL International, toute amnistie pour des crimes graves violerait le droit international. Un tel scénario est donc hors de question.

Il est urgent que les instances internationales à l’origine de la déclaration – le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest, la Commission de l’Union africaine et la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest– clarifient la situation et soutiennent la Gambie dans son processus de justice transitionnelle.

 

Une intervention du ministre de la justice gambien saluée

« Si l’ex-président Yahya Jammeh revient un jour au pays, il fera l’objet d’une arrestation immédiate et sera accusé des charges les plus graves », a réaffirmé le ministre de la justice gambien, Abubacarr Tambadou, le 19 janvier 2020 lors de la rencontre annuelle des juges et avocats dans la capitale.

Alors que les manœuvres de Yahya Jammeh sont inquiétantes pour la suite du processus de justice transitionnelle en Gambie, les propos du ministre de la justice rassurent. Le ministre a en effet reconnu que des crimes contre l’humanité ont été commis en Gambie entre 1994 et 2017, sous le régime de Jammeh. Il assure également que les coupables identifiés par la TRRC feront l’objet de poursuites judiciaires.

En exprimant clairement que l’ancien président ne jouira d’aucun passe-droit, le ministre Abubacarr Tambadou envoie un message fort à la Gambie. Il laisse espérer que le pays mènera à bien le processus dans lequel il s’est engagé, et pourra enfin tirer un trait sur son passé.

L’Initiative pour les droits humains au Burundi (IDHB) publie un rapport intitulé « Une paix de façade, la peur au quotidien », révélant les causes des violations des droits humains dans le pays.

Des personnes inconnues ont détruit la permanence du CNL, parti d’opposition, dans la province de Muyinga, le 5 novembre 2019. ©Privé

Ce projet indépendant, porté par deux chercheurs reconnus et experts de la région des Grands Lacs, vise à documenter l’évolution de la situation des droits humains au Burundi, avec un accent particulier sur les événements liés aux élections de 2020.

L’IDHB cherche à révéler les causes des violations des droits humains, en vue d’établir une base de données précises et fiables qui aidera à rendre justice aux Burundais. Carina Tertsakian, co-auteur du rapport, explique sa démarche : « La documentation des crimes est le premier pas nécessaire vers la justice. Elle permet aussi de maintenir l’attention des acteurs internationaux sur le Burundi, et de ne pas participer à la loi du silence imposée par le gouvernement actuel ». Les rapports de l’IDHB sont issus d’une collaboration avec un large éventail de personnes, à l’intérieur et à l’extérieur du Burundi.

Lire le rapport complet de l’IDHB

Depuis début 2020, la scène politique népalaise est plus paralysée que jamais sur la question de la justice transitionnelle (JT). Pour comprendre la situation, il faut remonter à la fondation des mécanistes de JT et au mécontentement croissant des victimes du conflit.

Face à l’impasse, qui sait quelle direction la justice transitionnelle népalaise prendra dans les prochains mois ? ©TRIAL International

Acte 1 : en 2015, création des mécanismes de JT malgré un avis de la Cour Suprême

Neuf ans après la fin de la guerre civile au Népal, deux mécanismes de JT ont été fondés pour enquêter sur les abus commis tant par l’armée régulière que par l’insurrection maoïste. Ils devaient établir la vérité sur ces crimes et en punir les responsables. Mais la Commission vérité et réconciliation (Truth and Reconciliation Commission, ou TRC) et la Commission pour l’investigation des personnes disparues (Commission of Investigation on Enforced Disappeared Persons, ou CIEDP) se sont rapidement révélées décevantes pour la société civile, au Népal et à l’étranger – dont TRIAL International.

Le fonctionnement des mécanismes de JT était obscur, et tous deux manquaient d’indépendance financière et politique. Parmi les autres écueils, un manque total de consultation avec les victimes du conflit elles-mêmes ; l’absence de dispositions allouant des réparations ; et des mesures de protection insuffisantes. Pire encore : les deux mécanismes de JT, censés faire reculer l’impunité, ont à plusieurs reprises tenté d’instaurer une amnistie pour certains auteurs présumés de crimes de masse.

La Cour Suprême du Népal a elle-même déclaré inconstitutionnels certains aspects de la loi établissant les mécanismes de JT. Les amendements demandés par la plus haute instance juridique du pays sont, à ce jour, restés lettre morte.

 

Acte 2 : en février 2019, un mandat non-renouvelé et des postes restés vacants

Quatre ans plus tard, les TRC et CIEDP n’ont pas commencé une seule enquête. Le recensement d’affaires a commencé en 2017 seulement, après que leur mandat ait été renouvelé une première fois. Plus de 60’000 victimes ont témoigné, mais aucun suivi réel ne leur a été offert. Parallèlement, les décisions du Comité des droits de l’homme de l’ONU se multiplient. Toutes appellent le Népal à apporter enfin justice et réparations aux victimes du conflit. Et toutes sont ignorées.

En février 2019, à l’occasion du troisième renouvèlement de mandat des mécanismes, les organisations de la société civile ont uni leurs voix pour demander des changements profonds. Le moment était idéal pour bâtir sur des bases solides, combler les lacunes et enfin respecter les demandes des victimes et de la communauté internationale. Il n’en a rien été. Depuis avril 2019, les mécanismes sont à l’abandon et les postes de Commissionnaires n’ont pas été repourvus. La justice est au point mort et les réparations se font toujours attendre.

 

Acte 3 : en janvier 2020, une « consultation » de façade et une ingérence politique bien réelle

Cette série d’événements nous amènent à la situation actuelle. Fin 2019, un Comité devait émettre des recommandations sur la nomination des nouveaux Commissionnaires – provoquant un maigre espoir de changement.

La consultation tant attendue s’est enfin tenue le 13 janvier 2020. Annoncée au dernier moment et sans agenda précis, elle a duré exactement 24h. Sans surprise, elle était loin de satisfaire les victimes.

Le 17 janvier 2020, les recommandations du Comité quant aux nouveaux Commissionnaires ont enfoncé le clou : des nominations manifestement politiques, résultat d’arrangements entre les deux principaux partis politiques et sans considération aucune pour les demandes de la société civile et des victimes. Ce processus faussé et sans transparence a conduit ces dernières à carrément rejeter les mécanismes de JT. Un point de non-retour ?

 

Et pour comble…

A ceci s’ajoute un dernier élément : le gouvernement a récemment nommé Agni Prasad Sapkota comme Président de la Chambre des Représentants. Sapkota est accusé d’avoir commis un meurtre en 2015 et fait l’objet d’une plainte devant la Cour Suprême du Népal. Dans un contexte déjà tendu, cette décision a été interprétée comme une preuve de plus de l’impunité qui règne dans le pays.

Déjà en 2011, quand Sapkota était devenu ministre de l’Information et de la Communication, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme des Nations Unies avait exprimé son inquiétude. Et rappelé l’obligation des États de s’assurer de l’innocence des individus nommés à des postes publics.

Face à cette impasse, qui sait ce qui se passera dans les prochaines semaines ou mois ? Dans le passé, les autorités ont montré leur mépris de l’opprobre nationale et internationale. Son Examen périodique universel devant l’ONU, prévu pour novembre 2020, changera-t-il la donne ? Rien n’est moins sûr.

 

A lire, la déclaration conjointe de Human Rights Watch (HRW), Amnesty International, la Commission internationale de juristes (CIJ) et TRIAL International (en anglais).

Depuis avril 2015, le Burundi est le théâtre d’une effrayante escalade de violence. De nombreuses violations graves des droits humains sont régulièrement commises à l’encontre d’individus suspectés de s’opposer au gouvernement. La répression touche tout particulièrement les membres de partis politiques d’opposition mais aussi leurs proches.

 

 

Les affaires de torture  sont malheureusement trop nombreuses et cette nouvelle affaire témoigne du climat d’impunité généralisée au Burundi. ©Will Baxter

Actif au sein d’un parti d’opposition, Olivier (prénom d’emprunt), est parvenu à alerter ses proches lors de son arrestation en 2015 par le Service National de Renseignement (SNR). Sa famille a immédiatement entrepris des recherches mais il a été impossible de localiser Olivier ou d’identifier son lieu de détention. A ce jour, Olivier n’a toujours pas été retrouvé.

Aucune enquête nationale n’a été ouverte pour établir ce qu’il s’était véritablement passé suite à son arrestation et les diverses dénonciations déposées par la famille d’Olivier n’ont pas abouti. Cette nouvelle affaire témoigne du climat d’impunité généralisée au Burundi.

 

Les familles des disparus également visées 

Le sort réservé à Olivier reste à ce jour inconnu. Alors qu’il est probable qu’il ait subit des actes de torture lors de sa détention, rien n’indique qu’il soit encore en vie. L’incertitude causée par les disparitions forcées est particulièrement douloureuse pour toutes les familles de disparus. En constante oscillation entre espoir et désillusion, ces dernières se trouvent incapable de faire le deuil de leur proche.

En plus de cette souffrance psychologique, la famille d’Olivier a également fait l’objet d’intimidations, non seulement pour les punir de l’opposition politique d’Olivier lui-même, mais aussi pour réprimer toute opposition future de leur part. Cette situation dramatique a poussé à l’exil une partie des proches du disparu. Ceux-ci ont finalement déposé une plainte pénale et plusieurs dénonciations au Burundi depuis la relative sécurité d’un pays voisin.

La souffrance aiguë engendrée par la disparition d’Olivier, couplée aux actes d’intimidation subis par la famille et à l’absence de volonté de la part de l’État burundais pour faire la lumière sur l’affaire, constitue un acte de torture.

 

De la responsabilité du Burundi

Rapidement alertés lors de l’arrestation d’Olivier, ses proches pensent en connaître l’auteur : un officier du SNR connu pour ses manières brutales. Toutefois, malgré le nombre de preuves rassemblées à leur encontre, la grande majorité des officiers jouissent encore d’une impunité totale au Burundi.

Le Burundi ne respecte pas les normes internationales en matière de droits humains, notamment concernant la torture, les disparitions forcées, les détentions arbitraires et les exécutions extrajudiciaires. Des abus généralisés et systématiques ont notamment été signalé lors du dernier rapport de la Commission d’enquête des Nations Unies.

Dans le cas présent, plusieurs éléments peuvent être reprochés à l’état burundais. Une fois les crimes signalés, le Burundi n’a pas entamé d’enquête impartiale sur les conditions d’arrestation d’Olivier. Par ailleurs, l’état burundais n’a entrepris aucune action pour apporter des réponses à la famille du disparu et mettre fin à leur souffrance. En ne reconnaissant pas les tortures subies par Olivier et sa famille et en ne sanctionnant pas les auteurs présumés, le Burundi a violé et continue de violer les normes internationales en matière de droits humains.

Face à l’inaction des autorités burundaises, TRIAL International a porté l’affaire d’Olivier devant une instance internationale. Une procédure est en cours.

 

Les affaires de torture au Burundi sont malheureusement trop nombreuses. A relire, les histoires de Miriam, Leo, Sara, Benjamin, ou encore David.

 

Portraits de bénévoles #6

Depuis 2018, 12 bénévoles sont exclusivement dédiés à la traduction du site de TRIAL International. Pour les remercier de leur engagement précieux, la série « Portraits de bénévoles » leur donne la parole. Ici, Apolline Bonfils explique comment TRIAL s’est démarquée des autres opportunités de bénévolat.

Ce que j’aime chez TRIAL, c’est sa mission de « vulgarisation juridique »: en résumant les affaires, elle les rend accessibles au grand public et leur portée devient bien plus large. ©Apolline Bonfils

« Je suis bénévole chez TRIAL depuis 2016. Je revenais d’un an d’études en Irlande et je cherchais à m’investir, si possible en pratiquant mon anglais. Mais la position des organisations ne me plaisait pas toujours, ni les missions proposées. Par ailleurs, mes études m’empêchaient de me déplacer.

A cette époque-là, j’utilisais la documentation de TRIAL International pour mes études en droit pénal international et en droit international humanitaire. C’est en parcourant son site que j’ai vu les offres de bénévolat. J’ai directement postulé, puisque j’admirais vraiment le travail de TRIAL et commençais à bien connaitre l’organisation.

La traduction était la forme d’engagement idéale car j’avais une bonne connaissance des termes juridiques, et cela me permettait de maintenir mon niveau d’anglais. De plus, les textes que l’on m’a fait traduire depuis m’ont permis de me tenir informée sur des sujets dont j’ignorais parfois l’existence. »

 

Une passion pour les droits humains

« J’ai toujours aimé mes études de droit mais je n’y trouvais pas vraiment ma voie… jusqu’à ce que je parte en échange universitaire en Irlande, à Trinity College, où j’ai étudié les droits humains sous différents aspects. Cette année à tout changé pour moi : j’avais découvert ma passion !

A mon retour, j’ai donc entrepris un cursus en droit international, spécialisé en droit de la reconstruction des États en période post-conflit. C’est à ce moment que j’ai rejoint TRIAL International.

Depuis, je me suis spécialisée sur le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, j’ai habité en Tunisie, au Liban et en Allemagne. Aujourd’hui, je travaille dans une ONG basée au Conseil de l’Europe à Strasbourg (France), sur des projets de coopération avec les pays du pourtour méditerranéen. »

 

Toucher un large public

« Ce que j’aime chez TRIAL, c’est sa mission de « vulgarisation juridique ». En résumant les affaires, elle les rend accessibles au grand public et leur portée devient bien plus large. Si je partage sur les réseaux sociaux une décision juridique, très peu de personnes vont s’y intéresser car il est bien trop long et complexe. C’est différent lorsque je publie un article écrit par TRIAL : Ils sont très accessibles, et très bien expliqués en ne gardant que l’essentiel. Souvent, des personnes étrangères au domaine juridique partagent l’article ou me posent des questions dessus. Cela permet à mon sens de donner une véritable visibilité aux situations de violations des droits humains.

C’est également un défi pour les traductions : il faut conserver les détails de chaque document mais le résultat doit également être lisible, donc ne pas traduire au mot à mot. Grâce à cela, j’ai pu affiner mon style rédactionnel et mon vocabulaire. »

 

Un bénéfice mutuel

« Le personnel de TRIAL qui nous envoie les traductions est réellement à l’écoute, et veille à la fois aux intérêts de l’organisation et aux nôtres en tant que bénévoles. Ainsi, j’ai pu indiquer quels sujets m’intéressaient le plus afin que les traductions qui s’y rapportaient me soient envoyées en priorité. De même, si je traverse une période chargée, je peux en avertir les responsables qui s’arrangent avec les autres traducteurs.

Enfin, je pense que mon bénévolat est un atout professionnel. Vu de l’extérieur, un engagement à long terme est indicateur de confiance. Et lorsque j’évoque TRIAL, beaucoup de gens connaissent l’organisation et la portée de son engagement ! »

 

Un message de Philip Grant, Directeur exécutif

 

Chères amies, chers amis,

Une nouvelle fois, l’année écoulée aura été riche en projets et ponctuée de victoires contre l’impunité. Et en cette toute fin 2019, deux nouveaux verdicts importants ont été prononcés qui contribuent à un monde plus juste.

En 2018, le groupe armé Raia Mutimboki Kokodikoko a pillé, torturé, violé et tué plusieurs centaines de victimes dans deux territoires de la province du Sud Kivu en République démocratique du Congo. Le procès de son chef et deux de ses complices a eu lieu cet automne et le verdict est tombé le 19 novembre dernier. Les trois ex-miliciens ont été condamnés pour crimes contre l’humanité. Mais ce n’est pas tout : fait exemplaire, l’État congolais a également été reconnu coupable de ne pas avoir protégé sa population et devra verser des réparations à des centaines de personnes. Ce procès titanesque a impliqué plus de 300 victimes, dont la majorité pour violences sexuelles. Cette victoire historique est le fruit de votre soutien et de la collaboration accrue de tous les partenaires sur place. Ensemble, nous sommes les acteurs du changement !

Plus proche géographiquement et après sept ans d’une bataille judiciaire acharnée, le Tribunal fédéral a confirmé la culpabilité d’Erwin Sperisen à 15 ans de prison. L’ex-chef de la police guatémaltèque a été reconnu coupable de complicité dans l’assassinat de sept détenus dans une prison en 2006. Nous avons accueilli cette décision avec un énorme soulagement pour les proches des victimes qui obtiennent enfin justice. Cette victoire nous rappelle combien la lutte contre l’impunité est un combat de longue haleine pour lequel il est nécessaire de marcher main dans la main.

Pour tous ceux qui luttent contre l’impunité, ces victoires apportent une lueur d’espoir. Grâce à votre soutien, nous pouvons poursuivre notre engagement auprès des victimes et assurer que leur droit à la justice soit respecté.

Je vous remercie sincèrement de votre solidarité et vous souhaite de très joyeuses fêtes de fin d’année.

Avec mes meilleures salutations,

Philip Grant, Directeur exécutif.

TRIAL International et son partenaire à Katmandou, le Human Rights and Justice Centre (HRJC), ont formé 14 défenseurs des droits humains sur les thèmes des disparitions forcées et des exécutions extrajudiciaires. Cette première session annonce une série de formations similaires à travers le pays tout au long de l’année 2020.

La formation comprenait l’analyse du cadre juridique international ainsi que des éléments concrets comme les techniques de documentation et d’entretien avec les victimes. ©TRIAL International

« Malgré mes dix années d’expérience dans le domaine des exécutions extrajudiciaires au Népal, je ne savais pas qu’un grand nombre de violations n’avaient jamais été signalées aux mécanismes internationaux. Cette formation m’a encouragé à porter ces cas à l’attention de la communauté internationale », déclare Ram Bikash Chaudhary, un militant népalais du Madhes Human Rights Home. Il a assisté à la première session d’une série de formations organisées par TRIAL International et le HRJC pour lutter contre deux crimes tristement répandus : les disparitions forcées et les exécutions extrajudiciaires.

 

Un contenu qui colle aux priorités locales

La formation a été conçue conjointement par TRIAL International et le Human Rights and Justice Centre. Une approche locale qui assure que cette session de trois jours soit la plus pertinente possible pour les acteurs népalais et qu’elle réponde à leurs préoccupations quotidiennes. 

« Nous avons conçu la formation de manière à tenir compte de la diversité des participants. Chaque participant pourra repartir avec des connaissances utiles dans son travail quotidien contre l’impunité. Cette diversité s’est également reflétée dans les ateliers interactifs », explique Salina Kafle, Chargée des droits humains au HRJC.

Les modules de la formation comprenaient l’analyse du cadre juridique international sur les disparitions forcées et les exécutions extrajudiciaires, une présentation des organes de l’ONU en charge de ces crimes, ainsi que des éléments concrets comme les techniques de documentation et d’entretien avec les victimes.

« Au cours de cette formation, les défenseurs des droits humains ont eu l’occasion de comparer le cadre national népalais aux normes internationales et de mesurer les écarts », explique Gabriella Citroni, l’experte internationale chargée de la formation. « Compte tenu de la culture de l’impunité dans le pays, les acteurs locaux doivent être en mesure de documenter avec précision les violations flagrantes des droits humains, en vue de les signaler et de les traduire en justice aux niveaux national et international. »

 

Une approche participative

Au cours de la séance, les participants ont été encouragés à partager leurs propres expériences, aidant ainsi les autres membres du groupe à appréhender le contexte général.

« La formation était unique car chaque cour théorique était suivi d’un atelier, où nous pouvions discuter librement », dit Sunil, de l’Alliance THRD, « cette méthode nous a permis d’approfondir le contenu des cours théoriques ».

 

La première étape d’un programme de renforcement des capacités

Suite à la formation, les participants à la formation ont testé leurs connaissances sur des cas réels d’exécutions extrajudiciaires et de disparitions forcées. Ils bénéficient pour cela de l’appui des experts de TRIAL International. Les participants les plus performants seront ensuite sélectionnés pour un coaching intensif de six mois sur la documentation des violations des droits humains, axé sur les disparitions forcées et les exécutions extrajudiciaires.

« L’accompagnement individuel permet un mentorat sur mesure », explique Ranjeeta Silwal, Coordinatrice du HRJC. « Sur une longue période, nous tissons de solides relations de travail avec les participants. Les expériences passées ont montré que notre collaboration se poursuit après la fin du programme ».

Cette session était la première d’une série de trois formations, chacune dans une région différente du Népal. La prochaine session aura lieu à Pokhara en août 2020.

 

En savoir plus sur le travail de TRIAL International au Népal

 

Cette formation a été financée par l’Union européenne, sous la coordination de TRIAL International et en étroite collaboration avec son partenaire local.

 

Un message de Benedict de Moerloose, Responsable du programme procédures et enquêtes internationales

La Suisse met souvent en avant son bilan en matière de droits humains. A TRIAL International, nous constatons une réalité bien différente. Certaines entreprises ou individus suisses sont en effet impliqués dans des activités qui alimentent des conflits armés, et qui peuvent constituer des crimes internationaux. Les populations civiles en paient le prix fort. Pillage de matières premières, exportations de composants chimiques vers des zones de guerre : ces comportements ne peuvent rester sans conséquences.

TRIAL International a récemment déposé une plainte en Suisse pour pillage en RDC. © Guy Oliver/IRIN

Face à des acteurs économiques puissants, les ONG doivent être soutenues, pour que leurs dossiers fassent le poids devant les autorités de poursuite. C’est pourquoi votre engagement à nos côtés peut faire la différence : nous avons besoin de vous pour que le profit ne l’emporte pas sur les droits humains.

L’impunité des entreprises dépasse les frontières : récemment, les autorités de poursuite suisses ont ouvert une enquête pénale officielle suite à une dénonciation pénale pour pillage, déposée par TRIAL International. Un ressortissant suisse actif dans le secteur minier est aujourd’hui soupçonné de crimes de guerre pour avoir exporté illégalement des ressources naturelles d’une zone de conflit en République démocratique du Congo.

En faisant un don, vous nous permettez de lutter contre l’impunité des entreprises. 

De tout cœur, merci pour votre engagement !

Benedict de Moerloose
Responsable du programme procédures et enquêtes internationales

TRIAL International et l’Open Society Justice Initiative (OSJI) saluent l’ouverture d’une enquête pénale par le Ministère public de la Confédération sur les agissements de Christoph Huber, un ressortissant suisse actif dans le secteur minier. M. Huber est suspecté de pillage de ressources naturelles en République démocratique du Congo (RDC), un crime de guerre aux yeux de la loi suisse. En novembre 2016, les deux organisations avaient déposé une dénonciation pénale, étayée par les nombreuses preuves récoltées au cours de leur enquête débutée en 2013.

L’exploitation illégale de ressources naturelles d’une zone de conflit pourrait valoir à M. Huber d’être accusé de pillage, un crime de guerre selon le droit international humanitaire. ©GuyOliver/IRIN

Le Ministère public de la Confédération (MPC) a confirmé avoir ouvert une procédure pénale contre l’homme d’affaires suisse Christoph Huber. Le MPC enquête depuis mars 2018 sur les accusations – formulées par TRIAL International et OSJI – de commerce illicite de minerais en RDC au cours de la deuxième guerre du Congo entre 1998 et 2003.

« Nous avons mis la main sur des documents commerciaux, ainsi que des documents internes du RCD-Goma, démontrant les liens d’affaires entretenus par Christoph Huber et ce groupe armé», a déclaré Bénédict De Moerloose, responsable du programme Procédures et enquêtes internationales de TRIAL International. «A l’heure où le public exige un engagement accru du secteur privé en faveur du respect des droits humains, l’ouverture d’une enquête sur les agissements d’un homme d’affaires occidental impliqué dans un commerce illégal en zone de conflit envoie un message fort à tout le secteur minier. »

Selon Ken Hurwitz, responsable du Programme Anticorruption de OSJI, « de nombreux conflits sont encore alimentés par la vente illégale de ressources pillées. Mais les entreprises et les hommes d’affaires impliqués ne sont que trop rarement poursuivis. Nous saluons l’ouverture d’une procédure par les autorités suisses dans cette affaire aussi complexe qu’importante. »

Les explications de Bénédict De Moerloose dans l’émission Forum de la Radio Télévision Suisse, le 12 décembre 2019

Des liens avec un groupe armé

Les deux organisations ont notamment découvert des éléments de preuve montrant que M. Huber commerçait directement avec le RCD-Goma, un groupe armé accusé de crimes de guerre qui contrôlait de larges territoires dans l’Est du Congo pendant le conflit. En 2001, l’entreprise représentée par M. Huber a en effet obtenu quatre concessions minières de la part du RCD-Goma, qui occupait militairement la zone dans laquelle se trouvent les mines. L’octroi de ces concessions était assorti de garanties de protection, assurées par les soldats du groupe armé. Avant l’obtention de ces concessions, M. Huber aurait déjà été impliqué dans le commerce de minerais dans la région au moins depuis 1997 pour le compte d’autres entreprises, y compris suisses.

S’il venait à être établi que M. Huber s’est livré à l’exploitation illégale et à l’appropriation de ressources naturelles d’une zone de conflit, il pourrait être tenu pénalement responsable de pillage, un crime de guerre selon le droit international humanitaire, et punissable selon le code pénal suisse d’une peine de prison de trois ans au moins.

Les deux organisations invitent maintenant le MPC à conclure rapidement son enquête.

Un éventuel procès dans cette affaire constituerait un précédent historique. En effet, ce serait la première fois en Suisse qu’un acteur économique ferait face à un juge pour des faits reprochés de crime de guerre de pillage. Pourtant, cette pratique a atteint des proportions alarmantes au cours des dernières décennies.

 

Un message de Selma Korjenic, Responsable du programme Bosnie-Herzégovine

Chers amis,

je m’adresse à vous depuis la Bosnie-Herzégovine où plus de 20 ans après la fin de la guerre, les séquelles sont encore vives. De nombreuses victimes souffrent encore aujourd’hui des crimes subis autrefois : traumatisme psychologique, précarité et stigmatisation sont le quotidien de nombre d’entre elles.

Le volet réparateur du droit est central pour que les victimes puissent aller de l’avant. ©Will Baxter/TRIAL International

La justice peut aider les victimes à se réapproprier leurs vies : grâce aux réparations, elles peuvent accéder à des soins, regagner leur dignité, et enfin tourner la page. Ce volet réparateur du droit est central à mes yeux.

C’est pourquoi je sollicite votre générosité aujourd’hui : Nous avons besoin de vous pour aider les victimes à obtenir réparation.

Comme je l’ai récemment rappelé devant le Conseil de Sécurité des Nations Unies, le droit aux réparations reste très inégalement appliqué en Bosnie-Herzégovine. De nombreux obstacles entravent encore l’accès à la justice. La violence détruit, mais la reconstruction est possible.

Cette année,un groupe de généreux donateurs double vos dons jusqu’au 16 décembre pour un montant de 30’000 CHF, chaque franc en vaut donc deux ! Engagez-vous dès maintenant et permettez à vos contributionsd’aller deux fois plus loin !

Un immense merci pour votre participation.

Selma Korjenic,
Responsable du programme Bosnie-Herzégovine

Il aura fallu sept ans pour que ce colonel des Forces armées de la RDC (FARDC) soit porté devant les juges. Accusé de crimes contre l’humanité sur des dizaines de civils, Safari Kateatea Amos a enfin comparu devant la justice en novembre 2019. Le résultat d’une longue lutte qui illustre l’impunité des officiers FARDC.  

Malgré les avancées de la justice dans l’est congolais, rares sont les affaires qui inquiètent les hauts gradés de l’armée. © MONUSCO/Sylvain Liechti

Pendant des années, les villageois de Karimba et Musinziro (territoire de Kabare, Sud Kivu) ont vécu au gré des affrontements entre l’armée régulière et les groupes armés FDLR et Raia Mutomboki.

En 2012, l’insécurité grandissante a poussé les civils à se réfugier dans le village de Lwizi, alors sous le contrôle du colonel FARDC Safari Kateatea Amos. Celui-ci leur a assuré que la paix était revenue et qu’ils pouvaient repartir dans leurs villages. Avant leur départ, Safari Kateatea Amos leur a assuré qu’il leur rendrait visite et que, comme signe de son arrivée, il tirerait quelques balles en l’air.

Les FARDC, protecteurs ou bourreaux ?

Le 21 juillet 2012, vers 5 heures du matin, les villageois de Karimba et Musinziro ont été surpris par l’arrivée des militaires FARDC placés sous le commandement de Safari Kateatea Amos. Se souvenant du signal convenu, les civils n’ont même pas tenté de se protéger.

Mais il s’agissait là d’un leurre : Safari Kateatea Amos et ses hommes ont férocement attaqué les villageois qu’ils étaient censés protéger. Des centaines de victimes ont été tuées, violées, torturées, leurs maisons incendiées et leurs biens pillés.

Haut gradé de l’armée, l’accusé se croyait intouchable

Le rang de colonel de Safari Kateatea Amos l’a protégé des poursuites pendant plusieurs années. Il avait même été arrêté puis libéré en 2012, pour des motifs encore inconnus.

Mais en mai 2019, l’action de plaidoyer de la Task Force Justice Pénale Internationale au Sud Kivu* a enfin porté ses fruits. Le parquet militaire supérieur du sud Kivu a fait arrêter Safari Kateatea Amos et l’a mis de nouveau à la disposition de la justice. Le procès s’est ouvert en novembre à Bukavu.

A l’approche du procès, les experts de TRIAL International ont aidé les avocats des victimes à documenter les crimes de façon rigoureuse, pour prouver leur caractère répandu et systématique. Plus de 40 victimes de meurtre, viol, torture et pillage ont ainsi pu être ajoutées au dossier. TRIAL International a également été impliquée dans la stratégie juridique des avocats des victimes, avant et pendant le procès.

Condamné malgré son grade militaire

Le 19 décembre 2019, le colonel Kateatea a été condamné à 5 ans de servitude pénale pour crimes contre l’humanité. La Cour a établi les meurtres, viols, torture et autres actes inhumains commis par le bataillon sous son commandement. Si sa responsabilité comme supérieur hiérarchique a été reconnue, son implication directe dans la commission des crimes en revanche, ne l’a pas été. Malgré la gravité des crimes commis, son manque de formation a été jugé comme étant une circonstance atténuante. Même si la peine prononcée est plutôt clémente, les droits des victimes n’ont pas pour autant été bafoués. La RDC et le prévenu – un agent étatique – ont été condamné à payer des réparations à la totalité des victimes dans la procédure (presque 100 personnes).

Malgré les avancées de la justice dans l’est congolais, rares sont les affaires qui inquiètent les hauts gradés de l’armée.

Le procès d’appel s’est tenu en audience foraine à Bukavu en septembre 2022. Le 23 septembre la Haute Cour militaire a prononcé son verdict qui a confirmé la condamnation du colonel Kateatea pour crimes contre l’humanité. Sur la base de la gravité des crimes et des préjudices subis par les victimes, la cour a modifié la longueur de la peine imposée à 10 ans de prison. Les victimes ont vu leurs réparations confirmées.

* La Task Force est un réseau informel d’acteurs internationaux qui collaborent afin de soutenir le travail des juridictions militaires congolaises dans l’enquête et la poursuite des crimes de masse en RDC.

 

Un message de Daniele Perissi, Responsable du programme Grands Lacs

 

Chers amis,

En République démocratique du Congo, nous avons assisté plus de 1’400 victimes dans 21 procès. Des victoires sans précédents ont été gagnées dans la lutte contre l’impunité !

La résilience et le courage des victimes sont le moteur de notre combat. ©UN photo/A. Burridge

Notre action est possible grâce aux nombreux partenariats de TRIAL International sur le terrain : seul l’effort collectif peut porter des fruits et contribuer à prévenir de telles atrocités.  Mais il reste tant à faire !

C’est pourquoi je sollicite votre générosité dès maintenant : nous avons besoin de vous pour soutenir encore plus de victimes dans leur quête de justice.

Je suis personnellement touché par le récit de chaque victime que nous accompagnons. Leur résilience et leur courage sont le moteur de notre combat. Tous nos partenaires sur place ont autant à cœur que nous de leur offrir les meilleures chances d’obtenir justice.

Suite au lancement de notre campagne de fin d’année à l’occasion de Giving Tuesday, nous comptons sur vous dès maintenant pour faire un don et agir concrètement en faveur des victimes. 

Ensemble, faisons de la justice une réalité pour tous, dès à présent et pour longtemps ! Merci de votre confiance.

Daniele Perissi
Responsable du programme Grands Lacs

TRIAL International publie un manuel sur la présentation de preuves photo et vidéo dans des procès pénaux. À la portée de tout professionnel du droit, ce manuel explique concrètement comment présenter ces preuves devant les principales juridictions internationales.

À l’heure de l’omniprésence numérique, de nombreuses questions se posent de façon pressante pour beaucoup de professionnels. ©Pexel

À quelles conditions des photos ou des vidéos peuvent-elles constituer des preuves pénales ? Comment collecter, stocker, analyser et présenter ces éléments audiovisuels devant des instances internationales ? À l’heure de l’omniprésence numérique, ces questions se posent de façon pressante pour de nombreux professionnels.

Pour répondre à ce besoin, TRIAL International a composé un manuel pratique intitulé La preuve audiovisuelle devant les instances internationales : techniques et admissibilité. L’organisation s’est pour cela associée avec deux avocates du cabinet Doughty Street, Me Jelia Sane et Dr Keina Yoshida.

Le manuel a été présenté le 5 décembre 2019 à La Haye lors de la 18e Assemblée des États Parties de la Cour pénale internationale. Une table-ronde d’experts, dont la Conseillère juridique de TRIAL International Chiara Gabriele, a mis en avant le potentiel des preuves audiovisuelles dans les procédures pénales nationales et internationales. 

« Nous avons fait l’expérience concrète, dans l’une de nos affaires, de comment des photos et des vidéos peuvent contribuer à la lutte contre l’impunité » explique Chiara Gabriele, éditrice du manuel. « Mais leur admission comme preuve est loin d’être automatique, et plusieurs éléments sont à prendre en compte pour en analyser pertinence, fiabilité et valeur probante. C’est pourquoi nous avons compilé ce manuel. »

 

Un outil de référence pour faciliter le travail des professionnels

La première partie du manuel juridique examine l’approche des instances pénales internationales quant à l’admissibilité et le poids de la preuve audiovisuelle. En second lieu, elle présente les circonstances dans lesquelles l’utilisation et le déploiement de moyens de communication audiovisuelle peut en soi constituer un crime international.

La seconde partie du manuel montre comment les moyens et des techniques audiovisuels sont employés pour recueillir des témoignages oraux en dehors du prétoire, soit en direct soit avant le procès. Le manuel aborde enfin les techniques audiovisuelles relatives à la protection des victimes et des témoins.

Le manuel se veut avant tout pratique et pédagogique. Des résumés réguliers et un index de la jurisprudence facilitent son utilisation par les professionnels.

Lire le manuel complet

Un message de Ranjeeta Silwal, Coordinatrice des droits humains

 

Chers amis,

Je m’adresse à vous depuis le Népal. Dans mon métier, je suis fière de collaborer avec des personnes aussi courageuses que dignes. Tous les jours, nous travaillons main dans la main avec de nombreux partenaires : avocats, journalistes, activistes… Notre but est le même : soutenir les victimes de violations graves des droits humains dans leur quête de justice.

Les victimes ont besoin de vous dès aujourd’hui ! ©Niranjan Shrestha

Mon expérience m’a prouvé que la collaboration est essentielle dans la lutte contre l’impunité. Ensemble, nous œuvrons pour un renforcement durable de la culture des droits humains au Népal.

Votre engagement est le maillon central de cette chaîne : Nous avons besoin de vous pour construire des ponts et soigner les blessures du passé.

Au Népal, les victimes font trop souvent les frais des disfonctionnements de la justice. Lenteur, ingérences politiques : leur parcours est semé d’embûches et il est de notre responsabilité de les accompagner dans cette quête.

Votre soutien est d’autant plus important en cette journée mondiale de la générosité, aussi appelée Giving Tuesday. Soutenez-nous dès maintenant dans ce combat de longue haleine et faites un don !

Ensemble, faisons de la justice une réalité pour tous, dès à présent et pour longtemps ! Merci de votre confiance.

 

Ranjeeta Silwal,
Coordinatrice des droits humains au Human Rights and Justice Centre (Katmandou)